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Les femmes du bus 678
Lumière sur les Égyptiennes harcelées
critique
rédigé par Michel Amarger
publié le 26/05/2012
Michel Amarger (Africiné)
Michel Amarger (Africiné)
Mohamed Diab, réalisateur
Mohamed Diab, réalisateur
Retour de l'enfant prodigue (Le), de Youssef Chahine, 1976
Retour de l'enfant prodigue (Le), de Youssef Chahine, 1976
Scène de Mercedes, de Yousry Nasrallah
Scène de Mercedes, de Yousry Nasrallah
Bushra (actrice et productrice du film)
Bushra (actrice et productrice du film)
Les Femmes du bus 678 de Mohamed Diab
Les Femmes du bus 678 de Mohamed Diab
Les Femmes du bus 678 de Mohamed Diab
Les Femmes du bus 678 de Mohamed Diab
Les Femmes du bus 678 de Mohamed Diab
Les Femmes du bus 678 de Mohamed Diab
Les femmes du bus 678
Les femmes du bus 678
Affiche arabe du film Les femmes du bus 678
Affiche arabe du film Les femmes du bus 678

LM Fiction de Mohamed Diab, Egypte, 2010
Sortie France : 30 mai 2012
Dist: Pyramide

Les changements de la société égyptienne sont répercutés par des documentaires engagés comme Tahrir de l'Italien Stefano Savona, 2011, qui circulent dans les festivals internationaux. On en profite pour rendre hommage aux précurseurs tel Youssef Chahine qui n'a pas ménagé pas son amertume envers le régime dans Le retour de l'enfant prodigue, 1976, ou Yousry Nasrallah qui a pointé les codes en vigueur dans la société avec Mercedes, 1993. Ce dernier soutient et encourage l'émergence d'une nouvelle génération combative, illustrée par les films de Ahmad Abdalla qui secoue par Microphone, 2010, Ibrahim El Batout, auteur de Hawi, 2010, Amr Salama, réalisateur de Asmaa, 2011, ou Mohamed Diab qui bouscule les tabous avec Les femmes du bus 678, 2010.



Tahrir - Liberation Square - Teaser 1 from Dugong on Vimeo



Le réalisateur traite de la violence subie par les Égyptiennes, en s'attachant à trois femmes d'origines différentes. Fayza, de milieu modeste, s'indigne contre les hommes qui profitent des transports bondés pour se frotter aux passagères comme elle. En réaction, elle se refuse à son mari et passe à l'offensive. Nelly, une jeune fille dynamique, qui joue des sketchs, engage des démarches pour porter plainte contre le harcèlement sexuel dont elle est l'objet en traversant sa rue. Elle se heurte aux résistances familiales, à l'exception de son fiancé qui l'épaule. Seba, une bourgeoise aisée, délaisse son époux qui l'a repoussée après des attouchements qui l'ont blessée en sortant d'un match de foot. Elle enseigne l'autodéfense à ses consoeurs sans moyens.





Les mésaventures de ces personnages féminins, unis par le désir et la force de résister, soulèvent la question de la domination masculine, ancrée dans la société égyptienne. En prenant la parole et en brisant les murs de la honte, ces héroïnes ont comme une valeur d'exemple, appuyée par le réalisateur. Il introduit son film par trois flash-backs pour composer la situation de chacune et croiser leurs différents points de vue. Chacune, victime de mauvais traitements, réagit à sa manière. L'une en répliquant physiquement, l'autre en mobilisant les femmes tourmentées, la plus jeune en s'obstinant à un procès qui permettra de faire reconnaître le délit de "harcèlement sexuel".

L'engagement marque le parcours du cinéaste égyptien. Après ses études dans une école de commerce, il intègre une banque américaine avant de s'orienter vers le cinéma en suivant les cours de la New York Film Academy. Son intérêt pour l'écriture, les propos sociaux, lui inspire quatre scénarios de films qui obtiennent de bons succès dont The island de Sherif Arafa, 2007. Logiquement, sa première réalisation, Les femmes du bus 678, est nourrie d'un fait réel auquel il a assisté, en 2008. Cette année-là, en Egypte, Noha Rushdi intente le premier procès en justice pour harcèlement sexuel. "Je me devais d'allumer le projecteur, pour que les femmes se lèvent et que les hommes sachent ce qui se passe", explique Mohamed Diab.

En ménageant un récit rythmé qui entremêle les destins, le réalisateur cultive à la fois le sens du spectacle et un regard aiguisé sur les couples en crise, la misère sexuelle, les différences de classe. Ses héroïnes, ripostant aux agressions, déclenchent une enquête de police, conduite par un inspecteur malin et magnanime, touché lui aussi par un drame. Ainsi les personnages secondaires tel le mari de Fayza, joué par Bassem El Samra, donnent du relief à l'histoire. Les comédiennes emportent la mise : Nelly Karim interprète Seba, Nahed El Sebai, vue dans Femmes du Caire de Yousry Nasrallah, 2009, campe Nelly et la chanteuse Boushra se transforme pour incarner la pauvre Fayza.

C'est elle qui a incité le réalisateur à développer son sujet en long-métrage, épaulant sa production. La diffusion du film en Égypte, un mois avant la révolution, a rapporté deux millions de dollars et couvert son coût de financement. La distribution en France, par la société Pyramide, s'inscrit dans le soutien de cette structure aux films de Youssef Chahine. Une référence pour Mohamed Diab qui revendique la liberté de l'auteur pour aborder tous les genres de cinémas. C'est pourquoi Les femmes du bus 678 vise à débusquer l'hypocrisie masculine et la violence d'aujourd'hui. Un combat relayé par les vagues de la révolution égyptienne.



Vu par Michel AMARGER
(Afrimages / RFI / Médias France)

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