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Majid, de Nassim Abassi
À la recherche de l'image d'un rêve d'enfant
critique
rédigé par Ahmed El Ftouh
publié le 28/10/2012
Affiche du film
Affiche du film
Ahmed El Ftouh (Africiné)
Ahmed El Ftouh (Africiné)
Nassim Abassi, réalisateur
Nassim Abassi, réalisateur
Majid
Majid

Le cinéma pour enfants est sans conteste le parent pauvre du cinéma marocain. La cinématographie marocaine compte très peu de films de longs métrages classés dans le genre films pour enfants. Ce constat est à la fois un appel à des investigations pour s'enquérir sur le pourquoi et le comment de cette carence à surmonter, ainsi qu'un clin d'oeil au réalisateur Nassim Abassi. Cette décennie sera différente, grâce à ce cinéaste qui nous offre enfin un beau film pour enfants.




"Majid" est un film pour enfants, mais également pour adolescents et adultes. Sa structure narrative est basée sur la quête. Quête d'une photo. Quête d'une identité, d'une existence, d'une famille, d'une tendresse, d'une chaleur humaine, d'une amitié… d'un rêve d'enfant. Et comme dans toute quête, les ingrédients nécessaires sont présents.
Le héros n'est autre que l'enfant Majid. Agé de dix ans, orphelin, il vit dans une petite chambre avec son frère à Mohammédia, ville côtière marocaine à environ 30 kilomètres de Casablanca. Pour survivre et aider son frère, il vend des livres devant une Mosquée ou s'improvise cireur de chaussures. Le seul souvenir matériel qu'il garde de ses parents - décédés dans un incendie de leur maison à Tanger - est une photo floue dans laquelle il apparaît, bébé, au bras de ses parents dont le visage est absent. Hanté par un rêve qui agite ses nuits d'enfant, il décide d'aller à la recherche de cette photo qui devient l'objet de sa quête.
Pour atteindre son but, il sera amené à traverser des épreuves initiatiques, à découvrir un monde d'enfants et d'adultes parsemé de difficultés et d'embûches. Un monde et une société pleins de contradictions. Son principal adjuvant sera son ami et compagnon de route Larbi. Petit, débrouillard et téméraire, Larbi est un enfant issu d'une famille très pauvre. Habitant un bidonville, il vend des cigarettes au détail dans un coin de rue qu'il s'est approprié et qu'il défend contre tous. Larbi sera le compagnon de route de Majid, ainsi que son ami, complice et ange gardien. Quand Majid quitte son frère qui ne croit pas tellement à son rêve de retrouver la photo des ses parents chez un ancien voisin de Tanger qui habite un quartier chic de Casablanca, il trouvera refuge chez Larbi. C'est là qu'il sera témoin incrédule de la violence et de la brutalité que subit Larbi de la part de son père. Et lui qui est à la recherche de la chaleur, de la tendresse et de l'amour des parents, il sera choqué par cette violence paternelle. Il sera de même choqué par une autre violence ; celle que subit Larbi de la part d'une bande d'enfants plus âgés qui le rackette et le terrorise. Lui qui croyait que le monde des enfants est un monde de rêve et d'innocence.
Majid et son ami arriveront quand même à surmonter ces épreuves de violence gratuite. Majid réussira l'épreuve d'être capable de se défendre et de se rendre justice en se vengeant, à sa manière, d'abord de celui qui l'avait brutalisé devant la Mosquée parce qu'il lui avait avoué sous la force qu'il ne faisait pas la prière. Ensuite, il s'est vengé de l'automobiliste qui allait l'écraser et qui au lieu de s'excuser l'avait giflé. Tous les deux, ils devront surmonter ensemble l'épreuve de réunir la somme d'argent qui leur permettra de voyager et d'échapper au danger de la rue.
À Casablanca, les deux enfants seront dans l'antre du monstre. Un adjuvant inopiné survient qui leur redonne l'espoir d'être sur la bonne voie.
De péripéties en péripéties, et de belles séquences en belles séquences où le comique est mêlé aux différents types de gags, les deux enfants subiront le racket d'une bande de voyous qui fait la loi dans un quartier de Casablanca. Ils y perdront tout espoir de continuer la recherche. C'est alors qu'un autre adjuvant survient. Un homme âgé et aveugle (joué par l'acteur Abdellah Lamrani) nous rappelle les mots du renard au prince dans le roman de Saint-Exupéry : "On ne voit bien qu'avec le cœur, l'essentiel est invisible pour les yeux".
La nouvelle figure de l'ancien voisin et ami de ses parents est une réflexion sur les arrivistes. Sa femme ne lui ressemble pas, heureusement. La suite n'est pas des plus heureux.
Mais le réalisateur a voulu nous faire passer le message qu'il existe aussi le rêve généreux de prétendre à un monde meilleur. Un monde à l'image innocente, un monde rêvé par tous les enfants du monde. Nassim Abassi ouvre des perspectives, à la fin du film avec une séquence de voyage.
Nous sommes en présence d'un conte moderne. Un conte de bien de chez nous, mais aussi universel, avec tous les ingrédients d'un conte. Nassim Abassi a bien su nous raconter, nous émouvoir et nous emporter dans le monde de cet enfant. Majid est à la fois sympathique, crédule, innocent, tolérant. Puis, il apprend vite à se mouvoir dans un environnement social partagé entre le bien et le mal, la violence et le pardon, la haine et l'amour, l'amitié et la cruauté, la tendresse et la méchanceté…

Par Ahmed EL FTOUH (CinéMag)
Septembre 2011

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