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Entretien avec Frank Olivier Ndéma, Délégué général des RIFIC, Yaoundé
"Nous voulons inculquer aux jeunes les fondamentaux du court métrage"
critique
rédigé par Pélagie Ng'onana
publié le 10/11/2012
Frank Olivier Ndéma, Délégué Général du RIFIC
Frank Olivier Ndéma, Délégué Général du RIFIC
Pélagie Ng'onana (Africiné)
Pélagie Ng'onana (Africiné)
RIFIC 2012
RIFIC 2012

Le délégué général des Rencontres internationales du film court (Yaoundé-tout-court) nourrit de grandes ambitions pour le festival qui tient sa 8ème édition du 29 octobre 03 novembre.

Vous avez décidé cette édition qu'il n'y aura pas de double diffusion, pourquoi cette option ?

On a mené une enquête durant toute l'année pour savoir quelles étaient les attentes des cinéphiles et c'est à partir de là qu'on s'est dit que c'était mieux de faire une projection par film. De manière à ce que les cinéastes et le public puissent aller regarder chaque film. Qu'ils n'aient plus l'alibi de n'avoir pas vu un film lorsque le jury donnera sa note. Pour le prix du public, ça permet de ne pas tricher en donnant des doubles votes par exemple.

Vous proposez également un village du festival, que vous apporte-t-il ?

Chaque année, on essaye d'innover. L'année dernière, on a apporté le tapis rouge. Cette fois, on s'est dit qu'il est souhaitable de mettre en place un village du festival, parce qu'on n'a pas encore assez de moyens pour faire des projections dans les quartiers comme on l'a fait dans les années précédentes. On met un village du festival en place pour que les jeunes puissent se rencontrer au cours d'une soirée qu'on va considérer comme "soir au village". Il y aura des beignets-haricot accessibles à tous, autour d'un film, afin de créer une ambiance comme cela se faisait à l'époque autour du feu.

Justement les projections dans les quartiers populaires peinent à se fidéliser, cette année vous revenez avec le projet, quelles garanties avez-vous pris ?

L'année dernière, le festival c'est tenu, on a juste diminué le nombre de quartiers. Il y a eu des projections au Centre culturel Zingui (situé à la périphérie de Yaoundé Ndlr) et on a préféré retirer les autres endroits. C'est une question de moyens.
Avec le Cinéma numérique ambulant, on essaye de voir, après le festival, comment sélectionner les meilleurs films et les diffuser dans les quartiers environnants. Ce sera une continuité du festival Yaoundé-tout-court. C'est un projet à long terme dont nous commençons déjà à fixer les bases.

Vous dites vous ouvrir davantage sur la professionnalisation dans la création, est-ce un aveu que les films se sélectionnaient avec complaisance ?

Il y a toujours de la complaisance dans un festival, c'est-à-dire qu'on donne aussi la place aux amateurs. Parce que si on ne retient par exemple que le thème du festival, aucun film ne rentre dans ce cadre. Maintenant, quand nous parlons de professionnalisation, c'est pour ramener les jeunes à la base même, aux fondamentaux du court métrage. Déjà que pour la compétition de Yaoundé-tout-court, nous avons réduit la durée des films, pour que les jeunes prennent conscience qu'il ne suffit pas de faire un 26 minutes pour dire qu'on a fait un court métrage. D'ailleurs, nous souhaitons introduire l'année prochaine une compétition des films très courts. Pour que, avec les partenaires de la place, nous puissions consolider les acquis au niveau des films courts et qu'ils puissent être vendus de par le monde.

L'année dernière, les films venant du Cfpa (Centre de formation professionnel de l'audiovisuel) ont été retirés du programme, mais vous parlez toujours d'un partenariat avec cette structure…

Le partenariat avec le Cfpa se négocie depuis pratiquement deux à trois ans. L'année dernière, les films ont été retirés parce qu'ils devaient être diffusés à la Crtv (Télévision nationale, ndlr). C'est un petit souci de procédure qui a été très vite résolu cette année. Nous avons déjà toutes les copies des films. Le partenariat est en voie d'être signé, et il y a une journée spéciale Cfpa qui est consacrée au village du festival. Je tiens à signaler que les participants à l'atelier de formation ont eu deux jours de visite au siège du Cfpa. C'est un partenariat qui nous est assez important et didactique pour des jeunes qui veulent se former aux métiers du cinéma et de l'audiovisuel. Nous envisageons aussi un partenariat avec l'Iscac (Institut supérieur de formation aux métiers du cinéma et de l'audiovisuel de l'Afrique centrale, dirigée par Bassek ba Kobhio, Ndlr) qui a très souvent des formateurs qui viennent de l'étranger, surtout que depuis la première édition, le festival Ecrans noirs est parrain de Yaoundé-tout-court. Tout ceci vise à améliorer le niveau des jeunes qui aspirent à ce métier.

Vous annoncez la signature d'un partenariat avec le ministère des Arts et de la culture, quels en sont les contours ?

Premièrement, c'est de pouvoir inscrire le festival Yaoundé-tout-court dans la liste des festivals officiels. Nous estimons qu'en huit éditions, nous ne devrions plus être au stade d'entreprendre les négociations. Puisque les réalisateurs et le public savent que le festival Yaoundé-tout-court se tient entre la fin du mois d'octobre et le début du mois de novembre. La deuxième négociation, c'est au niveau du partenariat financier. Le festival coûte cher, parce que nous avons des invités à faire venir, nous organisons des ateliers de formation...
Cette année par exemple, l'atelier a été subventionné par le Goethe Institut et le Service de coopération et d'animation culturelle de l'Ambassade de France, qui a offert une bourse d'un mois qui prend tout en charge. Et quand on a ce type de partenariat avec des institutions internationales, nous sommes un peu gênés de ne pas pouvoir présenter le soutien des institutions locales. Il y a un suivi technique et moral, mais nous avons toujours un problème financier. La ministre des Arts et de la culture nous a encore signifié l'intérêt qu'elle porte à notre festival, mais il existe encore des blocages qui n'émanent pas d'elle.

Vous insistez par ailleurs sur l'autofinancement qui fait la force de votre festival…

Chacun de nous - tous les stagiaires et bénévoles que nous avons - a un travail qu'il effectue. Vous avez des étudiants en cinéma, vous avez des décorateurs, des journalistes, et chacun a quelque part une rémunération. Nous essayons d'établir le bien fondé de débourser notre argent pour la tenue du festival, le flocage des tee-shirts, la confection des programmes, la recherche du matériel etc. Donc, même si nous faisons des emprunts, nous savons que tout le monde va contribuer au remboursement. Nous avons également le soutien de certains réalisateurs, de certaines familles mais aussi de la presse, qui savent tous que l'intérêt c'est de relancer le court métrage au Cameroun.

Pour la première fois, un débat s'organise autour du thème, avez-vous pensé à la suite ?

C'est clair que quand on organise un débat, il faut des débouchés. Nous avons pris le temps de bien étudier la chose parce que nous n'avons jamais organisé de débat avant. Le thème cette année c'est "Cinéma national et identité culturelle". Au sortir du festival, nous avons prévu, en partenariat avec l'OIF, de trouver les voies et moyens pour présenter l'identité culturelle nationale.
Quand on regarde les films de l'Afrique de l'Ouest - tout de suite, ne serait-ce qu'à partir du paysage, la façon de s'exprimer - on les identifie. Qu'est-ce qui fait la particularité du cinéma camerounais ? Ça, c'est le gros problème que nous posons. Les résultats que nous aurons après ce débat, nous pourrons tirer des conclusions et essayer de voir dans quelle mesure trouver des financements pour présenter l'identité culturelle camerounaise.

Vous faites en outre des démarches pour aider à la distribution des films, qu'est-ce qui a déjà été accompli ?

Ne serait-ce que l'année dernière, nous avons deux films ; l'un dont le réalisateur ira en novembre le représenter dans un festival. Le film est en fait en voie d'achat, et on a besoin du réalisateur pour conclure les contrats. Le deuxième est en train d'être aussi acheté par une télévision belge. Le contrat, si je ne me trompe, sera signé en début décembre. Bien entendu, nous sommes très sélectifs sur la qualité des films que nous envoyons. Le leitmotiv du festival c'est la diffusion, maintenant nous nous engageons dans la distribution pour aider les réalisateurs.

Et si on parlait du budget de cette édition…

Logiquement, pour un festival comme Yaoundé-tout-court, avec ce que nous nous proposons de faire, nous tournons autour de 30 millions de Fcfa. C'est-à-dire que c'est sans compter les invités qui doivent arriver, sans compter la prise en charge, l'atelier de formation. Bien évidemment ce n'est jamais facile de pouvoir rentrer dans ces frais. C'est pour cela que généralement à la fin du festival on est très endetté.

Propos recueillis par Pélagie Ng'onana

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