En explorant de nouveaux modes de production, le cinéma nigérian veut s'étendre à d'autres horizons et prouver qu'il y a bien de la place pour un autre cinéma que celui des films vidéos qui abondent l'industrie du pays le plus peuplé d'Afrique. Présenté en première mondiale au TIFF, Half of a Yellow Sun s'avère être le film nigérian qui a coûté le plus cher dans toute l'histoire de Nollywood.

Presque entièrement financé par des investisseurs privés, dont majoritairement la productrice Andrea Calderwood (Le Dernier Roi d'Ecosse), Half of a Yellow Sun est le tout premier long métrage du dramaturge nigérian Biyi Bandele. Le film est adapté du roman éponyme à succès de l'auteure nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, qui fut présente lors de la Première mondiale à Toronto.

Le film retrace l'histoire d'Olanna (Thandie Newton) et de sa sœur jumelle Kainene (Anika Nani Rose) issues d'une famille igbo aisée, de retour au pays après avoir effectué leurs études à Londres. Olanna est fiancée à Odenigbo (Chiwetel Ejiofor), un intellectuel révolutionnaire, Kainene entretient une relation avec un professeur britannique. Leur vie va prendre des tournures inattendues lorsqu'éclate la guerre du Biafra, à la fin des années 60, suite à l'Indépendance du Nigeria.

L'œuvre en soi reste une belle réussite pour une première réalisation, mais le film donnera peut-être l'envie d'aller chercher plus dans le livre, pour ceux qui ne l'ont pas lu, voire de le relire. Même si le récit concerne un des épisodes les plus marquants de l'Histoire du Nigeria après celui de son accession à l'indépendance, ce sont essentiellement des acteurs anglais qui constituent le casting des rôles principaux, bien que Chiwetel Ejiofor (qui tient le rôle du personnage principal aussi dans 12 Years A Slave) soit d'origine nigériane.

Quant au choix de Thandie Newton (Mission impossible, A la Recherche du Bonheur) dans le rôle d'Olanna, il avait suscité des réactions négatives, du fait que l'actrice soit métissée [née en Angleterre, d'une mère zimbabwéenne et d'un père anglais, elle a vécu en Zambie jusqu'à l'âge de trois ans avant de retourner au Royaume-Uni. A lire son interview sur son métissage (en anglais), ndlr]. Elle ne correspondrait apparemment pas au type de femmes igbos et ferait trop contraste avec Kainene, sa sœur dans le film (interprétée par Anika Nani Rose).
On songeait pourtant à d'autres actrices locales et connues telles que Kate Henshaw-Nuttall ou Omoni Oboli. Est-ce la une volonté de clairement se démarquer du cinéma de Nollywood, une manière de marquer une rupture avec les acteurs habitués ? Il faut souligner néanmoins la présence dans le casting de Geneviève Nnaji qui compte près de 80 films Nollywood à son actif !

Thandie Newton, Chiwetel Ejiofor, Joseph Mawle, Anika Noni Rose, Genevieve Nnaji, John Boyega


Bien d'autres auteurs nigérians tels que Obi Emelonye (Last flight to Abuja), ou encore Newton I. Aduaka (Ezra, One Man's Show), se distinguent aussi du style nollywoodien, offrant ainsi une autre perspective du cinéma nigérian que l'on découvrira davantage à l'occasion de festivals, contrairement aux vidéos films qui circulent par copies DVD.

L'industrie nollywoodienne va-t-elle parvenir à garder sa place parmi les premières industries cinématographique au monde, sans sa recette magique ?

par Djia Mambu
(Vanuit Het Zuiden, pour Africiné)
Toronto, Septembre 2013