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Interview de Mohamed Ulad, réalisateur de Hercule contre Hermès
Un cinéaste face à un milliardaire français immigré au Maroc
critique
rédigé par Halima Abrouk
publié le 25/06/2015
Halima Abrouk (Akhbar Al Yaoum)
Halima Abrouk (Akhbar Al Yaoum)
Mohamed Ulad, cinéaste marocain
Mohamed Ulad, cinéaste marocain
Mohamed El Mektiri ("Hercule")
Mohamed El Mektiri ("Hercule")
Hercule contre Hermès
Hercule contre Hermès
Hercule contre Hermès
Hercule contre Hermès
Hercule contre Hermès
Hercule contre Hermès
Hercule contre Hermès
Hercule contre Hermès
Hercule contre Hermès
Hercule contre Hermès
L'article de l'hebdomadaire VSD sur le film
L'article de l'hebdomadaire VSD sur le film

"J'ai fait une quarantaine de films, mais je n'ai jamais vécu une telle expérience".

- Trois ans après la diffusion de votre film Hercule contre Hermès, les procès continuent. La dernière audience a eu lieue à Paris mercredi dernier. Que s'est il passé pour que vous vous retrouviez une fois de plus devant un tribunal ?

Je ne peux pas répondre à cette question, il faudrait la poser à Monsieur Patrick Guerrand-Hermès qui continue à m'attaquer devant plusieurs tribunaux depuis 4 ans... Peut être qu'il a été énervé par le fait que le film ait récemment remporté le prix du Meilleur Documentaire Francophone de 2014.



- Vous vous êtes plaint récemment du fait que ni vous ni votre avocat n'aient été convoqué à une audience au cours de laquelle le juge a laissé les avocats d'Hermès plaider. Pensez-vous que la justice française sera plus équitable dans cette affaire ?

J'ai toujours dit que je faisais entièrement confiance en la justice de mon pays. Même s'il y a eu quelques fois des procédés incompréhensibles comme par exemple me faire juger en 1ère Instance avec 2M [chaine de télé, Ndlr] au Tribunal de Casablanca sans que je sois convoqué ni représenté par mes avocats. Tout comme à Asilah très récemment. Je ne peux pas imaginer cet incident devant un tribunal en France. Toutefois je le répète, je fais d'autant plus confiance en la justice marocaine que j'ai gagné tous les procès contre ce Monsieur et ce malgré ses milliards, ses réseaux et ses accointances avec les puissants.

- Comment vous êtes-vous retrouvé au milieu de ce conflit qui oppose une famille de paysans pauvres du nord Maroc à un milliardaire français ?

Moi je n'ai fait que mon travail que et de façon très honnête en recoupant toutes les informations. Je dois dire que j'ai été outré et choqué de voir comment ce Monsieur a fait détourner l'eau de 7 sources publiques, comment il a fait détourner celle de toute une rivière pour arroser son polo de 50 hectares, comment il a fait planter des poteaux électriques de hautes tensions pour son usage privé dans les terrains de paysans sans leur demander leur accord, comment il a fait couper le haut parleur appelant les fidèles à la prière sur la plage, parce que cela les dérangeait dans leur sieste (comme si moi dans un village français j'oblige une église à ne pas sonner les cloches un dimanche).

- Pouvez-vous nous parler des pressions que vous avez subies pendant le tournage du film et après sa diffusion ? Quels effets ont elles eus sur vous ?

Les pressions ont été très nombreuses et toutes sortes : agressions physiques contre moi-même et l'équipe française, destruction de matériel. Des faits extrêmement graves pour lesquels j'ai porté plainte à 3 reprises : contre le fils de Patrick Guerrand-Hermès [Olaf Guerrand-Hermès, ndlr] et contre plusieurs de ses employés. Je précise que les gendarmes ont refusé à plusieurs reprises d'enregistrer mes plaintes. Deux d'entre elles, qui remontent à presque 4 ans n'ont toujours pas été traitées à ce jour alors que celles du milliardaire aboutissent, 15 jours au plus, après leur dépôt. La seule plainte déposée par moi qui a été jugée était contre un employé important du milliardaire qui nous a agressé et empêché de tourner dans un sanctuaire (Marabout Sidi Mraït) malgré la présence d'un Imam, l'autorisation du Centre Cinématographique Marocain (obligatoire) et celle du Ministère des Affaires Islamiques (autorisation non obligatoire que nous avons tenu à obtenir).
Si cette plainte a abouti, c'est parce que l'employé en question faisait du trafic de drogue à échelle internationale. Il a d'ailleurs été arrêté pour ce trafic le lendemain de notre agression et condamné à plusieurs années de prison. En revanche, pour notre agression physique et la destruction du matériel de prise de vue, il a été condamné à 250 dirhams d'amende alors que notre matériel vaut plusieurs milliers d'euros.

Quant à l'effet de ces pressions sur moi, je parle des agressions physiques, morales, et des nombreux procès, elles n'ont jamais réussi à me faire douter ni flancher. Tout ce que j'espère maintenant c'est que mes deux plaintes aboutissent le plus vite possible.

- Avant de faire ce film, pouviez-vous imaginer que vous auriez à affronter autant d'entraves ?

Non, je ne pouvais vraiment pas imaginer que j'allais subir toutes ces pressions, ces agressions physiques et morales, cette dizaine de procès, ces intimidations et ces insultes. Tout cela est incroyable : j'ai réalisé et produit une quarantaine de films, dans le monde entier (en Iran, aux USA, au Brésil, au Canada, en France, etc.. Parfois sur des personnalités ne facilitant en rien la réalisation sereine d'un film, sur des hommes politiques candidats à la présidentielle, des malades psychiatriques etc). Mais jamais une telle pression n'avait été exercée à l'encontre de mon travail, alors que j'ai tourné Hercule contre Hermès dans mon propre pays, dans ma propre ville, et sur une plage que je connais parfaitement pour l'avoir fréquentée depuis mon enfance.

- Est-ce que vous toujours en contact avec la famille ?
Oui, bien sûr.

La famille continue de se battre comme elle peut. Le père d'Hercule est poursuivi pour diffamation avec moi-même et le producteur Français Nicolas Namur. A ce propos, je m'étonne du fait que le milliardaire n'ait pas poursuivi Hercule ni sa mère [Rachida El Mektiri, ndlr]. A mon avis, la raison est très simple : le père est légalement le propriétaire du terrain de la famille et à ce titre, il est le seul à pouvoir concrétiser une éventuelle vente. C'est encore une façon de lui mettre la pression pour le faire vendre.

Propos recueillis par Halima Habrouk
Akhbar Al Yaoum

Traduction française de l'interview en arabe de Mohamed Ulad paru dans le quotidien Akhbar Al Yaoum et sur le site AlYaoum24, le 21 juin 2015 : http://www.alyaoum24.com/321063.html
Avec l'aimable autorisation de Mohamed Ulad, cinéaste.
Source:
www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=1018300598181393&id=626999013978222

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