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I Am Not A Witch : une satire ensorcelante sur la condition féminine
critique
rédigé par Falila Gbadamassi
publié le 26/05/2017
Scène du film I Am Not A Witch, 2017
Scène du film I Am Not A Witch, 2017
Falila Gbadamassi (Africiné Magazine)
Falila Gbadamassi (Africiné Magazine)
Rungano Nyoni, réalisatrice zambienne
Rungano Nyoni, réalisatrice zambienne
Cannes 2017
Cannes 2017
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Scène du film
Femme namibienne
Femme namibienne
Femme namibienne
Femme namibienne
L'équipe du film I am not a witch, lors de la présentation du film, le 25/05/2017
L'équipe du film I am not a witch, lors de la présentation du film, le 25/05/2017
Quinzaine des Réalisateurs 2017
Quinzaine des Réalisateurs 2017


Les personnages que vous allez découvrir dans I Am Not A Witch n'ont jamais existé. La formule est courante mais elle est plus que jamais de circonstance en ce qui concerne la "fable" que la cinéaste zambienne Rungano Nyoni a présenté le 25 mai 2017 à la Quinzaine des Réalisateurs.

C'est un retour sur la Croisette où elle avait déjà projeté son dernier court métrage Listen (nommé aux Oscars) dans le cadre du programme de la Nordic Factory de la Quinzaine. C'est également à Cannes qu'elle a commencé à travailler sur I Am Not A Witch, en tant que résidente de la Cinéfondation en 2013.
L'héroïne de son premier long métrage, Shula, interprétée par la magnétique Maggie Mulubwa, a 9 ans. Et son village a décidé qu'elle était une sorcière. Une accusation qu'elle ne confirme ni ne réfute. Son silence lui vaut d'être condamnée à vivre dans un camp de sorcières, attachée par un ruban. Si elle décide de le couper, elle se transformera en chèvre.






Pour développer cette satire sur la condition féminine, Rungano Nyoni s'est inspirée des camps de sorcières que l'on retrouve dans plusieurs pays africains. "J'avais déjà beaucoup fait de recherches sur cette question de la sorcellerie parce qu'elle me fascine. J'ai décidé de mettre tous mes personnages dans ce camp de sorcières parce que cet univers me permettait de raconter tout ce que j'avais envie de raconter", a expliqué la cinéaste lors de la projection de son film.
Elle s'est notamment documentée sur le phénomène en séjournant au Ghana. C'est le pays "où les camps sont les plus organisés". "Certains ont environ 200 ans (…). En Zambie, les situations sont différentes selon les régions. Par exemple, un chef traditionnel enfermait les sorcières dans son palace, les faisait travailler pour ensuite les libérer. Mais globalement, ces camps de sorcières ont le même fonctionnement".

Des femmes ou des animaux ?

Dans le conte imaginé par Rungano Nyoni, Shula débarque dans un camp de sorcières où il n'y a que des femmes qui ont l'âge d'être sa grand-mère. D'ailleurs, l'une d'elles, qui porte toujours un rosaire à son cou (bijou pas très catholique pour une sorcière), la prend sous son aile et lui donne le nom de sa petite-fille. Démarche nostalgique car l'enfant ne veut plus s'approcher de sa grand-mère depuis qu'elle est condamnée à son triste sort. L'arrivée de Shula est une cure de jouvence pour ses compagnons d'infortune. D'autant que la fillette a les faveurs d'un officiel du gouvernement, Mr Banda, savoureusement incarné par Henry BJ Phiri. Le personnage s'avère vil mais surtout ridiculement fasciné par la mythologie qu'il contribue à nourrir. Shula devient bientôt une vache à lait qu'il est obligé de scolariser sous la pression de l'opinion publique. La fillette s'est, elle aussi, prise au jeu. Mais peut-il continuer indéfiniment ?

Dans I Am Not A Witch, Rungano Nyoni rappelle que, dès leur plus jeune âge, les femmes sont obligées de revendiquer leurs droits d'être humain. Question de (sur)vie. "Dans certains pays, vous êtes plus libres quand vous êtes un animal que quand vous êtes une femme". C'est en ces termes que la réalisatrice zambienne donnait une idée de son projet cinématographique à d'éventuels partenaires, rapporte Juliette Grandmont, sa productrice française.
En s'appuyant sur une superbe photographie, qui donne une sorte de patine à l'image, un humour grinçant, un sens pointu du symbole avec ce ruban qui "contrôle" les "fameuses sorcières" et des choix musicaux inattendus, Rungano Nyoni illustre avec brio et fantaisie les carcans dans lesquels les femmes, en Zambie et en Afrique notamment, sont enfermées telles des sorcières dans un camp, livrées à des touristes voyeurs et indifférents. Pour combien de temps encore ?

Falila Gbadamassi, correspondance spéciale

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