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Samouni road de Stefano Savona
La neutralité partiale de Stefano Savona
critique
rédigé par Hassouna Mansouri
publié le 11/05/2018
Hassouna Mansouri est Rédacteur à Africiné Magazine
Hassouna Mansouri est Rédacteur à Africiné Magazine
Stefano Savona, réalisateur italien
Stefano Savona, réalisateur italien
Scène du film
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Le film sort en salles, en France, le 7 novembre 2018 (distribution : Jour2Fête).


Dans son édition 2018, la Quinzaine des réalisateurs fait place à un documentaire qui vaut bien la peine. Samouni road de Stefano Savona est en lice pour L'œil d'or. C'est un documentaire sur la vie d'une famille gazaouie, dans le contexte de l'embargo imposé par Israël sur la bande de Gaza, et puis surtout qui a subi le poids de la guerre de 2009.






Ce film, comme souvent dans le documentaire, se trouve dépassé par les événements. Savona était parti faire un film sur les conditions de vie des Gazaouis sous l'embargo doublé des conflits intestins entre les dirigeants palestiniens. Lorsque l'armée israélienne envahit la bande de Gaza en 2009, le cinéaste italien ne parvient pas à quitter la région et assiste impuissant ce qui se passe. Il revient juste après la fin des opérations et retrouve la famille complètement défaite. Il accompagne les membres ayant survécu à l'intervention militaire israélienne dans une nouvelle reconstruction de leur vie. Il les avait laissés en train de préparer un mariage. Quand il les retrouve, ils en sont encore au stade des préparatifs sauf que ceux qui les avaient commencés sont maintenant partis et avec eux les maisons et les oliviers. Il faut tout reconstruire et replanter comme cela se passe régulièrement en Palestine depuis la création de l'état d'Israël et le début de sa politique d'occupation.

Mais le film est amputé d'une partie. Savona a tourné avant et après le drame. Il lui manque ce qui s'est passé pendant les opérations, les conditions dans lesquelles une grande partie de la famille a été décimée. N'ayant pas été tournée, cette partie sera donc reconstituée en animation. En interviewant les survivants, le cinéaste recolle les morceaux du puzzle. Et pour avoir une vue la plus complète possible de ce qui s'est passé, il retrouve aussi les traces des événements vus du côté de l'armée israélienne. Ainsi dans cette partie en 3D, l'on assiste à un regard croisé des deux côtés ; du témoignage des enfants terrorisés, aux conversations entre la salle de commandement des drones et leurs pilotes, en arrière-plan des images des drones eux-mêmes.

Que ce soit dans la partie tournée ou dans celle animée, Savona se contente d'enregistrer la réalité qui lui vient. Et même l'animation, qui est plus une nécessité en fait qu'un choix délibéré, n'enlève rien à la gravité des choses. Bien au contraire, elle lui permet de se positionner en regard neutre. Aussi recueille-t-il les témoignages des Gazaouis mais il les confronte aux enregistrements des échanges de l'armée israélienne pendant les opérations. Ainsi assistons-nous en témoins à l'hésitation d'un pilote qui refuse de tirer sur des enfants alors que son commandant lui en donne l'ordre.
Comment donc rester neutre face à l'abject. C'est tout simplement Impossible, sauf si l'on considère que la neutralité dans son objectivité est d'office du côté juste. Il est peut-être même trop facile de se mettre explicitement du côté du faible en se montrant partial. Or, il se trouve que l'impartialité permet de mettre à nu la bêtise et l'arbitraire de la disproportion. De ce fait, elle rend plus service au faible, en accentuant l'injustice qu'il subit. Samouni Road est une démonstration que la meilleure manière de servir la cause des opprimés c'est d'être objectif. Le bon sens et l'injustice ne font certes pas bon ménage.

par Hassouna Mansouri
Correspondance spéciale

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