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BlacKkKlansman, Capharnaüm et Burning : un soupçon d'Afrique et trois candidats à la palme d'Or
critique
rédigé par Falila Gbadamassi
publié le 19/05/2018
Falila Gbadamassi est rédactrice à Africiné Magazine
Falila Gbadamassi est rédactrice à Africiné Magazine
Spike Lee, réalisateur américain
Spike Lee, réalisateur américain
Nadine Labaki, réalisatrice et actrice libanaise
Nadine Labaki, réalisatrice et actrice libanaise
LEE Chang-dong, réalisateur sud-coréen
LEE Chang-dong, réalisateur sud-coréen

La sélection officielle de la 71e édition du Festival de Cannes compte de nombreux réalisateurs originaires du continent africain. De même, de nombreux récits qui concourent pour la palme d'Or font allusion à l'Afrique et à sa diaspora. Outre leurs liens avec l'Afrique, la qualité de ces œuvres est remarquable. Ils ont déjà été distingués par plusieurs prix.


Le prix de la critique internationale (Fipresci) a été décerné à Buh-Ning (Burning) du Sud-coréen Lee Chang-Dong, le prix du jury œcuménique est revenu au film de la Libanaise Nadine Labaki, Capharnaüm, et une mention spéciale de ce même jury attribué à BlacKkKlansman de l'Américain Spike Lee. Ces trois films, qui ont fait sensation sur la Croisette et qui sont en bonne place pour la palme d'Or, ont également la particularité d'évoquer le continent africain, déjà bien représenté dans cette sélection officielle 2018, à travers sa diaspora (BlacKkKlansman), la question de l'émigration et ses conséquences pour les Africains (Capharnaüm) et la façon dont les traditions du continent peuvent inspirer ailleurs dans le monde (Buh-Ning).






D'abord, il y a le très emblématique BlacKkKlansman qui a une résonance particulière, au moment où les droits civiques des Afro-Américains sont de plus en plus bafoués dans l'Amérique de Donald Trump. Le film raconte l'histoire vraie de Ron Stallworth (John David Washington, le fils de Denzel Washington), premier policier noir recruté par la police de Colorado Springs. Au début des années 70, il va réussir - grâce à son collègue et "doublure blanche", Flip Zimmerman (Adam Driver) - à infiltrer l'organisation suprématiste blanche, le Klu Klux Klan (KKK). En outre, il réussit à tisser une relation particulière avec le "Grand Wizard"(*) du Klan, David Duke.

Pour traiter d'un sujet aussi important que délicat, Spike Lee utilise le ridicule de la situation - des Blancs racistes qui prennent un Noir qui se joue d'eux pour l'un des leurs - pour donner le ton de son œuvre. Le résultat est éblouissant, aussi bien dans le fond que dans la forme. BlacKkKlansman est un film majeur qui s'inscrit dans son temps et son époque. C'est un coup de poing que Spike Lee a qualifié d' "appel à la mobilisation". Le cinéaste rappelle la menace que constituent les dérives racistes partout dans le monde. Spike Lee a maintes fois rappelé, lors de la conférence de presse de son film à Cannes, que la situation décrite dans son œuvre ne concernait pas que son pays. Il a ainsi critiqué l'Europe, à propos de la façon dont elle traite les migrants et ses immigrés.

D'immigrés, il en est question dans le superbe Capharnaüm de la Libanaise Nadine Labaki porté par l'extraordinaire performance d'une révélation, le jeune acteur Zain Al Rafeea (Zain à l'écran également). Ce dernier mérite sans conteste un prix d'interprétation pour la fluidité et le naturel qui se dégage de son jeu quand bien même sa vie ressemble beaucoup à celle de son alter égo cinématographique. Dans cette fiction sur l'enfance maltraitée, à travers la figure de cet enfant de 12 ans qui fait un procès à ses parents pour lui avoir donné vie, Nadine Labaki s'intéresse également à ces domestiques sans-papiers exploités dans les foyers libanais. Celle que va rencontrer Zain est éthiopienne et elle est incarnée par Yordanos Shiferaw. Celle qui incarne Rahil a souligné, émue jusqu'aux larmes, que sa vie était également celle de son personnage. La réalisatrice libanaise a constitué un casting de comédiens non-professionnels époustouflants.

Enfin, dans Buh-Ning (Burning), le drame s'installe après le retour d'Afrique de deux des protagonistes. Jongsu (Ah-in Yoo) croise par hasard le chemin de Haemi (Jong-seo Jun), une jeune fille qui était sa voisine. Ils renouent et cette dernière lui confie son chat avant d'aller découvrir les Bushmen, peuple indigène d'Afrique australe dont elle apprécie la philosophie de vie. A son retour, elle est accompagnée par Ben (Steven Yeun), rencontré durant son séjour africain. Cet homme, qui a un certain train de vie, va bouleverser le quotidien des deux jeunes gens. De la Corée du Sud, Buh-Ning (Burning) souligne combien tous les citoyens sont interconnectés dans un surprenant et efficace thriller psychologique mené avec brio.

La valeur cinématographique de ces trois œuvres est indiscutable. Chacun d'eux mérite de figurer au palmarès de la 71e édition du Festival de Cannes car ces films, tout en faisant état de la marche du monde et des défis communs à notre humanité, nous ont offert un grand moment de cinéma.

Falila Gbadamassi

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