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Les armes miraculeuses, de Jean-Pierre Bekolo
L'Homme noir, cet explorateur perpétuel
critique
rédigé par Annick R. Kandolo
publié le 28/02/2019
Annick Rachel KANDOLO est rédactrice à Africiné Magazine
Annick Rachel KANDOLO est rédactrice à Africiné Magazine
Jean-Pierre Bekolo, réalisateur camerounais
Jean-Pierre Bekolo, réalisateur camerounais
Scène du film
Scène du film
Xolile Tshabalala (Lesedi, l'épouse), actrice et productrice
Xolile Tshabalala (Lesedi, l'épouse), actrice et productrice


Le réalisateur camerounais est à la conquête de l'Etalon d'or de Yennenga avec son dernier long métrage. Le film, dont le titre est inspiré du livre d'Aimé Césaire, plonge dans le couloir de la mort pour interroger les voies de libération de l'Homme noir.

Un homme, trois femmes. Les années 1960, l'apartheid bat
son plein dans l'Etat de Free State. Le décor est très vite planté. A l'aide de travellings maîtrisés, les chemins de trois dames convergent vers
un même lieu. Sur un vélo pour la première, dans une voiture de location
pour la deuxième et dans la sienne pour la dernière. Elles vont à la rencontre du même homme, un condamné à mort.

Jean-Pierre Bekolo projette ce qu'il appelle "une image de radiologie" de la condition d'opprimé de l'Homme noir depuis la nuit des temps. Serait-ce sa destinée du fait de la couleur de sa peau d'où la réplique du film qui dit, en substance, que la peau est une prison ? En effet, en se gardant de donner la raison de la présence de Djamal Okoroko, campé par Emil Abossolo Mbo, dans le couloir de la mort, le réalisateur le laisse croire.

Mais, comme pour montrer que cette destinée peut et doit être refaçonnée par le premier concerné, Bekolo revêt de la tunique ambigüe du résigné et du combattant qui recherche les armes de sa défense contre l'oppression dont il est victime.
Dans sa position de résigné, Djamal se révèle guidé par ses pulsions, ses
sentiments et besoins d'homme qu'il ne peut dépasser. Tout en témoignant son amour à sa femme Leseli, jouée par Xolile Tshabalala, par ailleurs productrice du film, il montre une tendresse presqu'amoureuse à Laurence, portée par Maryne Bertieaux, avec qui il correspond. Puis, il assouvit ses fantasmes avec l'aide de Stéphanie, sa professeure de français sous les traits d'Andrea Larsdotte. De même, les trois femmes cèdent à la futilité. Tous oublient, alors, le véritable enjeu, c'est-à-dire l'exécution imminente de Djamal. Se pose la question de savoir, si l'Homme noir est assez conscient de sa condition, tant il se laisse, facilement, porter par tout sauf ce qui doit le conduire vers son épanouissement réel.

Dans son costume de chercheur, le héros explore les voies qui le
conduiront vers son épanouissement. Pour se faire, le réalisateur lui offre trois possibilités représentées par les trois femmes dans sa vie. La première, sa femme, n'est autre que son reflet à lui. Doit-il trouver le chemin en lui-même ?
Il semble y croire. Cependant, cela ne l'empêche pas de se tourner vers une autre possibilité, le savoir. Il en a soif car se disant que c'est peut-être la solution. Mais dans quelle langue ? Peut-être le français qu'il décide d'apprendre avec l'aide de Stéphanie.

De l'aide venue de loin, cela pourrait aussi servir, pense-t-il ; et ce sera Laurence. Face à ces possibilités, ces voies, la direction à prendre demeure floue pour Djamal. Et Jean-Pierre Bekolo invite, avec une photographie soignée et tout en musique, à les explorer, à les questionner. Mieux, à envisager d'autres, à trouver ces armes qui relèvent presque du miracle. Parce qu'une chose est sûre. Djamal Okoroko a envie, sinon besoin, de s'épanouir, de se libérer, de vivre, juste comme un Homme. Il doit laisser sa trace, être immortel.

Annick Rachel Kandolo (Burkina Faso)

Africiné Magazine No.3 - Mercredi 27 février 2019, pages 01 et 03 /// 26è FESPACO

Ce magazine est publié par la Fédération Africaine de la Critique Cinématographique (FACC / AFFC). La publication a été rendue possible grâce au soutien de l'OIF, Africalia Belgium, le Goethe-Institut et l'Ascric-B. Il est réalisé par un collectif de 42 journalistes provenant de 23 pays.

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