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Le Cimetière des éléphants, de Eléonore Yaméogo
Que sont devenus les pères blancs ?
critique
rédigé par Cornélia Glèlè
publié le 28/02/2019

Après le silence qui a suivi la sortie de son premier film documentaire Paris mon paradis, en 2011, la Burkinabèe Eléonore Yaméogo signe un nouveau film, toujours sur la thématique de l'émigration.


Dans Paris mon paradis, la réalisatrice aborde le mythe de la vie en Europe, de la migration des Noirs vers le vieux continent. Par contre dans Le Cimetière des Eléphants, elle emmène le cinéphile dans l'univers des pères blancs, ces premiers missionnaires qui ont migré vers l'Afrique afin d'"apporter la bonne nouvelle et Jésus-Christ aux noirs ignorants".

Le film raconte la vie tumultueuse des missionnaires pères blancs dans leur périple à travers l'Afrique. Il retrace leur itinéraire, depuis l'arrivée des premiers d'entre eux avant la colonisation, jusqu'à leur retour en France, à un âge avancé, pour achever leur existence dans une maison de retraite. Cette maison de repos est située à Bry-sur-Marne, en banlieue parisienne. Les riverains l'appellent le cimetière des éléphants. Elle accueille une trentaine de pensionnaires.

Au début du film, Eléonore Yaméogo se pose des questions sur sa foi, elle ne comprend pas pourquoi les églises en Europe sont vides alors que les "blancs" lui ont dit que "Jésus était le salut et qu'il fallait honorer le jour du Seigneur". Elle ne comprend pas non plus le lien réel entre la colonisation et l'évangélisation de l'Afrique. Elle se promène donc entre Bry-sur-Marne, Pau et Ouagadougou. Elle rencontre les premiers missionnaires et un historien afin de comprendre.

Le film est lent, prend du temps à entrer dans le vif du sujet. A cause de la délicatesse de son sujet, Eléonore prend un premier temps (plus de 30 minutes) pour avoir des nouvelles des prêtres, comprendre à quoi ressemble leur vie une fois qu'ils quittent l'Afrique ; elle montre leur quotidien dans la triste maison où ils attendent la mort. Eux sont plutôt contents de recevoir de la visite, ils profitent pour parler des langues africaines (bambara, mooré) qu'ils n'ont plus souvent l'occasion de parler, ils ne voient pas la caméra. Tout ce qu'ils voient, c'est une ancienne catéchumène qui vient voir ces anciens curés tous devenus vieux. Entre deux discussions, la réalisatrice parvient quand même à poser la question
qui fâche : "Avez-vous endormis les Africains pour mieux les piller ?". Les réactions sont diverses, les pères ne veulent pas être mélangés au colon même s'ils sont arrivés en Afrique presqu'au même moment. Ils se défendent, et accusent même les Africains de racistes parce que selon eux, pour les Africains "Prêtre ou non, tous les Blancs sont blancs et tous les Blancs sont colonisateurs". Etre Blanc dans l'Afrique de leur temps aurait été donc un handicap et manier les langues locales ne suffit pas pour s'intégrer. Mais malgré tout en Afrique un père blanc était "quelqu'un".

Le film est coproduit par VraiVrai films, Onezik, et KTO Tv. Eléonore Yaméogo affirme avoir eu beaucoup de mal à financer son film, vu que beaucoup de bailleurs n'aimaient pas le côté religieux. Avec son équipe, ils ont pu dépasser la limite de la religion, ils sont restés dans le social, l'humanisme en filmant les moments d'émotion de quatre prêtres protagonistes tous morts aujourd'hui. Deux sont décédés pendant le tournage et les deux autres à la fin du film qui est en compétition officielle à cette 26ème édition du FESPACO 2019.

Cornélia Glèlè (Bénin)

Africiné Magazine No.3 - Mercredi 27 février 2019, page 7 /// 26è FESPACO

Ce magazine est publié par la Fédération Africaine de la Critique Cinématographique (FACC / AFFC). La publication a été rendue possible grâce au soutien de l'OIF, Africalia Belgium, le Goethe-Institut et l'Ascric-B. Il est réalisé par un collectif de 42 journalistes provenant de 23 pays.

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