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Le petit monde d'une fille d'aujourd'hui
Sofia de Boubakar Diallo
critique
rédigé par Jacques Bessala Manga
publié le 16/07/2005

Festival Ecrans Noirs du cinéma d'Afrique francophone (FENCAF, Yaoundé, Cameroun), 2005.

Bulletin n°4.

Le film aux accents musicaux du Burkinabè Boubacar Diallo, nous rappelle la "home video" nigériane par ses choix esthétiques et sa construction. Les cinq premières minutes du film annoncent la suite logique d'une histoire aux multiples péripéties qui ne peut que se terminer comme un conte de fée. Une jeune femme plus que belle, Sofia, est plaquée au bord d'une route par un amoureux qui a certainement trouvé plus avenante que sa dulcinée. Les choses n'étant pas tout à fait le fruit du hasard, Bill, un jeune musicien, mi-saltimbanque, mi-roturier, vient à passer, et deviendra vite celui autour duquel tout tourne dans cette histoire assez simpliste. Qu'il s'agisse de l'opportuniste Balla croqueur de femmes rencontré au hasard d'une randonnée de Ouagadougou à Bobo Dioulasso où Sofia recherche son amoureux Bill, ou bien Fatou Ndiaye la restauratrice croqueuse d'hommes et à cheval sur les principes du business, les autres personnages ne sont là que pour faire rebondir une intrigue largement prévisible.

Le grand mérite du film est pourtant le sentiment d'identification que le réalisateur réussit à établir avec le public, lequel ne peut qu'adhérer fatalement au désespoir de Sofia face à la maladie de sa seule sœur qui lui reste après le décès accidentel de leurs parents, à ses détresses face à ses nombreuses déceptions amoureuses, à l'humanisme du groupe de musiciens qui souscrivent pour lui venir en aide au risque de refouler leurs rêves, à la candeur de Bill dont l'amour pour Sofia, son égérie de bord de route, n'a pas de prix.

Ce sont bien les ficelles du cinéma populaire et du roman sentimental style Adoras qu'utilise Boubacar Diallo pour capter ainsi les spectateurs : Sofia rêve du prince charmant ; elle est saisie par l'amour et sa déception sera aussi grande que sa passion ; elle doit résoudre une avalanche de jeux du destin qu'il faut résoudre en urgence au risque d'y perdre son âme ; elle se fait avoir et devra se rattraper en s'opposant aux méchants.

Tout cela serait beaucoup plus fort si l'image n'était pas si plate et statique avec le personnage souvent cadré au centre. Le jeu des acteurs n'est pas forcément en cause : quand l'image leur fait faire tapisserie, leurs possibilités d'expression sont limitées. L'utilisation du français renforce cette impression théâtrale. Delphine Ouattara, dans son interprétation de Fatou Ndiaye, donne quant à elle une belle épaisseur à son personnage et le rend crédible, même si cet humour sur les Sénégalais frise le stéréotype méprisant.

De même, en dehors des chansons de Bill, la musique est souvent plaquée, couvrant les bruits d'ambiance, au lieu de soutenir le récit et l'éclairage ne souligne pas l'action. Tout cela trahit la faiblesse du budget d'une oeuvre dont le succès local ne souffre pourtant d'aucune ambiguïté. Il en reste une belle histoire d'amour où les sentiments l'emportent sur l'argent, même s'il faut cet argent pour se sortir d'affaire.

Jacques BESSALA MANGA
et
Alain Roland BIOZY
Cameroun

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