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Un film lent, émouvant et poétique
Les habits neufs du gouverneur, de Mwézé Ngangura
critique
rédigé par Martial Ebenezer Nguéa
publié le 16/07/2005
Martial E. Nguéa
Martial E. Nguéa
Mweze Ngangura
Mweze Ngangura

Africiné - Bulletin n°4.
Festival Ecrans Noirs du cinéma d'Afrique francophone (FENCAF, Yaoundé, Cameroun), 2005.

Après Pièces d'identités, Mweze Ngangura reste dans la veine du cinéma populaire mais choisit un genre peu utilisé dans les cinémas d'Afrique* : il pose Les habits neufs du gouverneur dans une comédie musicale. Cette histoire d'amour lyrique entre le gouverneur Féli (interprété par le musicien congolais Félix Wazekwa qui a joué autrefois avec Koffi Olomidé) de l'ethnie Zerbo et Mopaya son épouse issue des Krowas sera l'occasion d'une méditation sur les conflits ethniques et le pouvoir. Dans une société corrompue et tribaliste, Féli et Mopaya vivent une histoire d'amour démarrée dans l'enfance et qui aura donné Petit prince, leur fils. Féli prend du grade et acquiert du pouvoir mais cet univers de délation, convoitise et clivages ancestraux creuse un fossé entre l'époux et sa famille. Entre le bonheur conjugal et l'ascension sociale est-il possible pour une femme de sauvegarder une union réunissant deux ethnies opposées depuis des lustres ?

Féli n'a d'autre choix que de cacher sa femme et son enfant dans une dépendance du palais pour accepter le poste de gouverneur. Et la machine du pouvoir se met en place, avec son lot de conspirations et de répressions. Comme dans Mobutu, roi du Zaïre du Belge Thierry Michel, le roi se retrouve seul, sans entourage fiable, à la merci de "Chiens méchants" style Quartier Mozart.

Au mépris des larmes d'une femme malheureuse et d'un fils sans avenir, le destin de Féli se joue au rythme lancinant de la rumba congolaise : il plonge dans le pouvoir au point d'y perdre la lucidité et se laissera berner par des larrons qui lui font croire que ses habits inexistants seront vus de tous comme un bel apparat.

Mais le roi est nu lorsqu'il renonce à ce qui faisait sa richesse au départ : sa famille, ses amis et leurs compétences (le tailleur), ses valeurs. Pourra-t-il s'en sortir ? Il faudra un être pur pour le ramener à la lucidité, condition d'une relation positive avec son peuple.

Voilà un vrai conte ! Et Mweze est allé le chercher au Nord, dans les contes d'Andersen, qui sont racontés à tous les enfants européens. Mais il l'adapte aux réalités africaines et l'ancre dans le vécu de Kinshasa.

Apparaissant souvent en médaillon, Papa Wemba chante le récit et en tire les enseignements, à la manière des griots d'Afrique de l'Ouest. Sa douce voix de rossignol nous emporte dans une sphère spirituelle, bien au-delà de notre propre moi, et nous le suivons volontiers dans ces joutes musicales.

par Martial E. NGUEA (Cameroun)

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