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Ce n'est pas une "bêtise" !
Khorma, le crieur de bonnes nouvelles, de Jilani SAÂDI (Tunisie)
critique
rédigé par Zouhour Harbaoui
publié le 14/09/2005

Khorma, un jeune homme arriéré mental, vit à Bizerte sous la protection de Bou Khalbe. Tous deux occupent une place importante dans cette ville puisqu'ils sont préposés à l'annonce des mariages, des décès, et à s'occuper des morts.


Or un jour, Abou Khalbe se trompe. Au lieu d'annoncer un mariage, il annonce un décès. Et quelques temps après, le décès a vraiment lieu. Cela suffit pour évincer Abou Khalbe et mettre à la place Khorma. Comment un "idiot du village" peut-il arriver à avoir une mainmise sur un véritable petit monde?

C'est que Khorma, depuis sa "prise du pouvoir" n'a rien d'un idiot. Il pense, il analyse, il calcule. Cependant, cette période de jouissance ne dure pas longtemps, et Khorma sera "destitué" de sa fonction par ceux qui l'avaient choisi...

Khorma, la bêtise est un véritable régal pour les yeux et pour les sens. Tout d'abord avec une histoire qui tient debout et qui s'éloigne du cinéma tunisien que nous avons l'habitude de voir et surtout du thème de la femme (ouf!).

Un "Algernon"

Jilani Saâdi a mis en valeur un personnage, qui, dans notre société, est en marge. Il s'agit de l'attardé mental ; celui au détriment duquel on rit, on se moque. Mais voilà, qui est pris qui croyait prendre. Les hommes qui avaient placé Khorma à la tête des métiers de la mort, en espérant le manipuler, se sont mis le doigt dans l'œil, puisque Khorma a retourné la situation à son avantage.

Khorma, la bêtise, par bien des égards, nous a rappelé le roman de Daniel Keyes, Des fleurs pour Algernon, l'histoire d'un attardé mental sur qui des médecins pratiquent une intervention chirurgicale dans le but de situer son intelligence. Et Charly devient très intelligent. Mais pour combien de temps ? Dans le cas de Khorma, cette intelligence, provoquée par un subite besoin de pouvoir, ne dure que le temps d'un soupir. Khorma a voulu jouer de son nouveau prestige trop rapidement. Même s'il a eu un éclair de lucidité, il n'a pas pensé à asseoir son "pouvoir" comme il le faut et cela sous l'influence d'autres. Le message de Jilani Saâdi est clair et net. Il n'y a pas besoin de polémiquer dessus.

Mohamed Hassine Graya : un acteur méritant

Outre l'histoire, la technique de tournage utilisée par Jilani Saâdi n'a rien de reprochable et les images choisies le sont avec soin, comme cette scène de funérailles plus que poignante.

Cependant, le seul reproche que nous pouvons faire à Khorma, la bêtise, c'est sa fin. Autant Jilani Saâdi s'est éloigné des thèmes traditionnels du cinéma tunisien moderne, autant sa fin fait retomber le film dans le classicisme "bateau". Nous pensons que le réalisateur aurait dû terminer sur cette image, ô combien symbolique, de Khorma attaché au poteau abandonné par tous.

Quant à l'acteur principal, à savoir Mohamed Hassine Graya, il a su épouser son personnage, bien que ce rôle n'était pas prévu pour lui au départ. Mais finalement, Jilani Saâdi a réalisé le bon choix en optant pour Mohamed Hassine Graya.


Malheureusement, Khorma n'a pas eu le succès escompté à sa sortie dans les salles de cinéma tunisienne à sa sortie en 2002-2003 ; le public n'ayant sûrement pas saisi la sensibilité du réalisateur et de l'histoire.

Zouhour HARBAOUI

Khorma, la bêtise (Khorma, le crieur de bonnes nouvelles), Jilani SAÂDI, Tunisie, 2002, 1h20

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