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Les ratages d'un hommage
La boîte magique, de Ridha BÉHI (Tunisie)
critique
rédigé par Zouhour Harbaoui
publié le 14/09/2005

Le film de Ridha Béhi, La boîte magique, aurait pu être un petit chef-d'œuvre. Mais, malheureusement, le réalisateur et scénariste a complètement raté le coche…ou plutôt le sujet.

Raouf, cinéaste d'une quarantaine d'années, est sollicité par une télé européenne afin de réaliser un film sur ses rapports d'enfant avec le cinéma. Délaissant femme et enfants, il retourne à Kairouan, ville où il a grandi, et se souvient.

Les rapports de l'enfant avec le cinéma -sujet ô combien intéressant- ont été carrément occultés par Ridha Béhi qui s'est contenté de coller de petits bouts de flash-back à quelques "situations présentes", sans aucune cohérence, du moins dans certaines séquences.

Le réalisateur nous a fait penser à un écrivain jetant, en vrac, aux travers du papier, les idées de son nouveau roman, ou encore à un peintre faisant l'esquisse de sa nouvelle toile. Mais là où le romancier et le peintre vont épurer, modeler, remodeler leur "bébé", Ridha Béhi, lui, semble-t-il, n'en a que faire, et a préféré filmer l'ébauche de son travail.

Un "sous-produit"

Après avoir visionné le film, La boîte magique nous a fait pensé à un "sous-produit" d'autres films tunisiens et étrangers.

La scène du hammam -thème totalement archaïque et dépassé du cinéma tunisien- nous a remis en mémoire, sans conteste, Halfaouine, l'enfant des terrasses de Férid Boughedir, même s'il existe une différence primordiale : le hammam de La boîte magique est un hammam d'hommes.

Les femmes du long métrage de Ridha Béhi ressemblent étrangement à celles de La saison des hommes de Moufida Tlatli, etc.

Mais le pire n'est pas là ! Le pire c'est que ce film rappelle trop Cinéma Paradisio de Guiseppe Tornatore, avec Philippe Noiret, Jacques Perrin, Salvatore Cascio et Marco Leonardi. Cinéma Paradisio relate le chemin parcouru par un réalisateur. Tout commence par l'annonce de la mort d'Alfredo, l'ancien projectionniste du cinéma Paradiso.

Sur la route pour assister à l'enterrement, Salvatore se souvient de sa jeunesse dans ce village sicilien, la découverte du cinéma dans la cabine de projection. Ses débuts en tant que projectionniste après l'incendie du cinéma. Son premier amour et les premiers films qu'il tourna dans ce village.

D'ailleurs, Ridha Béhi fait référence "verbalement" à Cinéma Paradisio dans La boîte magique, quand une des comédiennes déclare à Raouf, de manière ironique, à peu près ce discours là : "Alors tu vas réaliser un nouveau Cinéma Paradisio?"

Questions en suspens

Est-ce pour légitimer son "sous-produit" que Ridha Béhi écrit cette réplique dans son scénario ? N'a-t-il pas voulu insinuer, de cette manière, "Voilà, je parle de Cinéma Paradisio et comme ça personne ne pourra m'accuser de plagiat" ?

Et puis, La boîte magique laisse trop de questions en suspens : pourquoi l'oncle de Raouf habite-t-il chez les prostituées ? Comment le petit garçon était-il devenu cinéaste ? Par quoi il a été réellement poussé à faire ce métier ? Car rien, tout au long des 90 minutes du film, n'a été le déclencheur de cette passion.

Et puis dans le film de Ridha Béhi, il n'y a pas vraiment de cause à effet. Si l'on prend l'une des images de la fin, ce cimetière d'antennes paraboliques n'a rien à voir avec l'histoire. Cette mort symbolique du cinéma ne peut découler aucunement de ce qui précède.

Zouhour HARBAOUI

La boîte magique, Ridha BÉHI, Tunisie, 2002, 90 min.

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