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Le cinéma africain : continuité et rupture
Afriques 50 : Singularités d'un cinéma pluriel. (L'Harmattan, 2005)
critique
rédigé par Mbye Cham
publié le 08/01/2007

À la différence de nombre de cultures filmiques et narratives dans d'autres parties du monde, le cinéma africain est marqué par un degré relativement substantiel d'intertextualité, une description que j'utilise ici pour me référer aux nombreux liens tissés entre les films qui constituent le corpus courant du cinéma africain, et notamment aux liens entre les films africains récents, et les premiers films réalisés.
Que ce soit par le biais de la répétition, de la révision, de la reproduction, de la parodie, de la transgression, ou encore d'une combinaison de toutes ces données - et de quelques autres - beaucoup de films récents entretiennent des types spécifiques de relations avec ceux qui les ont précédés. Ils peuvent, certes, présenter des caractéristiques et des traits communs (en termes de sujet, thèmes, styles et langages) sous l'étiquette "nouveau cinéma", mais ils entrent en "résonance" avec des éléments qui caractérisent certains des films qui les ont précédés.
Comme on le dit souvent, peu de choses sont nouvelles sous le soleil et peu de choses naissent du vide, sans référence ou relation aux choses antérieures, que ce soit de manière consciente, volontaire, préméditée ou pas. Le royaume du cinéma africain de même, possède ses propres modes et modèles logiques de référence, résonances, et relations propres.
Les relations entre les films "anciens" des pionniers de la première génération et les films de la "nouvelle génération" sont complexes. Elles ont à voir avec la façon dont ces deux catégories de films utilisent les ressources des traditions africaines artistiques et populaires, en particulier, tout autant que d'autres traditions et pratiques - principalement occidentales. Cela inclut, aussi, des relations entre des films réalisés par le même réalisateur sur un certain laps de temps.
Comment des films récents comme Tableau Ferraille (1997) de Moussa Sène Absa, Clando (1996) de Jean-Marie Teno, Asientos (1995) de François Woukoache ou Pièces d'Identité (1998) de Ngangura Mweze, par exemple, peuvent-ils être mis en relation avec des films plus anciens comme Xala (1973) de Ousmane Sembène, Soleil O (1971) de Med Hondo, Reou Takh (1972) de Mahama Johnson Traoré ou Black Goddess (1975) d'Ola Balogun ? Et quelle filiation peut-on retrouver dans le travail, disons de Safi Faye, de Lettre Paysanne (1976) à Mossane (1997), ou entre Wend Kuuni (1982) et Buud Yam (1997) de Gaston Kaboré ? Pouvons nous considérer Borom Sarret (1963) comme le temple sur lequel le reste de l'œuvre suivante de Sembène Ousmane est érigé ?
Je crois que se poser de telles questions peut éclairer le discours sur la continuité et les ruptures dans le cinema africain. De telles questions ont toujours préoccupé les cinéastes africains, depuis le début des années 1960, jusqu'à aujourd'hui. Elles persistent actuellement et les réalisateurs continuent à se débattre dans la myriade de défis auxquels ils ont éternellement à faire face, en explorant voies et stratégies qui pourraient leur permettre de s'échapper des espaces confinés dans lesquels ils ont opéré / agi jusqu'ici. Pour quelques-uns des plus jeunes, en particulier, la réponse est une cassure radicale avec le passé, la nécessité de nouvelles directions, l'urgence d'installer de nouveaux modes de signification pour que les films africains deviennent commercialement plus viables, plus séduisants par rapport au public, à la fois dans et en dehors du continent, en bref qu'ils deviennent plus "Cinéma", plus universels. Les impératifs du changement et du renouveau, et la création d'un cinema différent, viable et vraiment africain sont toujours à l'ordre du jour de l'agenda de création et d'activisme des cinéastes africains.
Nous faisons références aux nombreux manifestes (Alger 1975, Niamey 1982 et d'autres depuis), aussi bien qu'aux divers regroupements et associations tels que le Comité Africain des Cinéastes (Med Hondo, Ousmane Sembène, Tahar Cheriaa, Lionel Ngakane, Hailé Gerima etc., dits "Les Anciens") dont le but était / est le progrès sur tous les fronts du cinéma. De telles préoccupations ont animé, également, au début et au milieu des années 80, des groupes de (alors) jeunes cinéastes (Cheick Ngaïdo Bâ du Sénégal, Gaston Kaboré du Burkina Faso, Fadika Kramo Lanciné de Cote d'Ivoire et d'autres) qui se sont mobilisés sous la bannière de L'Œil Vert, militant pour de nouvelles directions et de nouvelles pratiques dans le cinema africain. Que les résultats à proprement parlés aient égalés la vigueur de la rhétorique est matière à débat. Cheick Ngaïdo Bâ, un des dirigeants et des avocats les plus bruyants de L'Œil Vert réalisa Xew Xew (1983), avant de tout abandonner pour devenir un opérateur politique au Sénégal ; Gaston Kaboré réalisa Zan Boko (1988), suivi par une série de courts métrages et par son dernier film en date, Buud Yam (1997), qui peut être vu comme la première "suite" dans le cinema africain, et Fadika Kramo Lanciné, après avoir remporté l'"Étalon de Yennenga" pour son film Djeli au FESPACO 1983, a continué avec une autre œuvre, Wariko (1994). De quelle manière ces films sont-ils nouveaux et différents, si on les compare avec d'autres, réalisés précédemment par les mêmes réalisateurs ou par d'autres cinéastes ? À travers l'ensemble des questions qui animent les débats actuels, et en référence à ce qui précède, quels sont les éléments de ces films qui constituent un retour à la période du début et du milieu des années 80, ou même à une période antérieure ? Qu'est-ce qui est nouveau dans les "nouveaux" films africains ?
Les commentaires, faits par quelques réalisateurs et critiques, positionnent la nouveauté et les différences thématiques et formelles comme des traits particuliers, une marque des productions récentes des années 90 qui, à leur tour, signent une évolution et des changements en relation à leurs prédécesseurs des années 1960 et 1970. Parmi de nombreux autres éléments, ils attirent l'attention sur l'accélération dans le rythme de quelques films récents (en tant qu'opposé à l'allure et au rythme lent des films des débuts), le niveau qualitatif plus élevé des productions (opposé aux mauvaises qualités visuelles, sonores, scénaristiques des films plus anciens) leur localisation urbaine, cosmopolite et métropolitaine (en opposition aux localisations à prédominance rurale et campagnarde des premiers films), leur référence à un style occidental, particulièrement Africain américain, style MTV avec un style et un langage d'avant-garde (opposé aux références ethniques précédentes), leur engagement plus ouvert vers une problématique de sexualité, (opposée à une certaine pruderie dans les films des débuts), leur prise en compte de l'hybridité raciale et culturelle en tant que direction du futur (opposée à un nationalisme narcissique et essentialiste, racial, ethnique et culturel), l'accent mis sur l'individu et le désir (opposés à l'intérêt communautaire des films précédents), leur désengagement de la politique et de l'idéologie (en opposition à une obsession des politiques et idéologies nationalistes et des thèmes de l'oppression et de la libération, caractéristiques des films des débuts). En bref, l'absence de marque des anciens films dans les nouveaux est présentée comme une différence significative, qui rapproche les nouveaux films de ce qui est considéré comme le cinéma normal ou plus universel, ce qui accroît leur succès dans les circuits commerciaux, à la fois à l'intérieur et au-delà de leurs frontières. Et là, résiderait, jusqu'à un certain point, le futur développement du cinéma africain. Comme dans le cas de L'Œil Vert, je crois que le temps sera l'arbitre d'un tel pronostic.
En même temps, je voudrais soumettre quelques-unes de ces observations à l'épreuve, voir quels modèles émergent de la juxtaposition des "anciens" et "nouveaux" films. Je ne suis pas intéressé par des comparaisons qualitatives, car une telle entreprise est de peu de valeur pour mieux situer et comprendre la nature des liens ou des "manques" entre les films africains récents et les plus anciens ; non plus que je ne suis en train de suggérer une aphasie, un manque de "mouvement" dans le cinema africain, pris comme une totalité, de ses débuts au présent. Je ne parle pas, non plus, de l'influence de l'"ancien" sur le neuf, même si de telles influences ont été reconnues et peuvent être identifiées dans quelques cas.
Ne pas parler des relations entre le passé et le présent en termes d'influence évite le piège d'ériger les anciens en norme, comme le bâton de mesure avec lequel jauger les films récents, qui doivent être considérés en eux-mêmes ; les relations sont faites de dialogues et de dynamique, je crois, et les nombreuses façons par lesquelles le "vieux" est manifeste dans le nouveau, sont à mon avis, complexes, productives et transformatives. Dans ce sens, le "vieux" est régénéré, dans le cadre d'orientations et de styles différents et même "nouveaux".
Remakes et "suites" sont rares, pratiquement non existants dans le cinéma africain, à l'exception de Buud Yam, que, en dépit de la résistance initiale de Kaboré, beaucoup de spectateurs et de critiques considèrent comme Wend Kuuni Part 2.
Je n'arrive pas à me souvenir d'autres films africains, réalisé par le même cinéaste ou des réalisateurs différents qui peuvent être reliés de cette manière. Quoique Djibril Diop Mambety caractérise son travail en terme de deux séries de trilogies, une série de ses films concernant le pouvoir et la folie, Touki Bouki (1973), Hyènes (1992) et le projet Malaika (interrompu par sa disparition en août 1998), et l'autre série de ses courts métrages récents, étiquetés " Contes des gens ordinaires ", Le Franc (1994), La Petite Vendeuse du Soleil (1999), L'Apprenti Voleur (également resté à l'état de projet interrompu), on ne peut parler pourtant dans son cas de re-makes ou de séries.
Ce que l'on obtient généralement dans le cinéma africain, entre les productions anciennes et les plus récentes, est une toile complexe de relations, à travers laquelle les films récents, à dessein ou inconsciemment, continuent, révisent, recontextualisent, parodient, contestent et subvertissent des aspects et des éléments des films d'avant, en même temps qu'ils projettent nouvelles considérations et nouveaux styles et s'étendent dans des domaines inconnus jusque-là.
Il serait improductif de parler d'un divorce total et absolu et de déconnecter le nouveau de l'ancien, car ce n'est jamais le cas, dans aucune tradition de narration. Dans le cinéma africain le "parfum" des pères fondateurs est toujours présent. Prenons un film comme Xala et un film récent comme Tableau Ferraille. La chute de Daam Diagne racontée dans le film Tableau Ferraille de Moussa Sène Absa en 1997, invite à des parallèles avec la fortune et la destinée de El Hadji Abdou Kader Beye, dans Xala, le film de Ousmane Sembène en 1973. Les deux films positionnent leur narration dans les discours des trahisons post-indépendances, des mauvaises gestions politico financières, des doubles transactions et des corruptions, des dislocations et des distorsions culturelles, et dans l'urgence de transformation réelle, individuelle aussi bien que sociale. Daam Diagne revisite, répète et recontextualise El Hadji Abdou Kader Beye dans un Sénégal post-dévaluation, structurellement ajusté par la banque mondiale. Comme le fait Gagnesiri, la première femme de Daam, par rapport à Adja Awa Astou, première femme de El-Hadji. L'entremise féminine et la subjectivité à laquelle fait allusion Xala dans la révolte de la deuxième femme, Oumie Ndoye, signifiée par les mots et les actes de la fille de El-Hadji, Rama, sont présentés comme un effet de la post dévaluation, tièdement féministe, plus verbeux dans Tableau Ferraille dans la personne de la deuxième femme de Daame, Kiné, que le désir d'une liberté financière (elle veut ouvrir une galerie d'art et fait de nombreux voyages) leurre au point qu'elle "travaille" avec les collègues de son mari, pour précipiter sa chute. Les stratégies narratives de Tableau Ferraille révèlent des exemples de répétition, différents dans leur relation de ceux de Xala. Les deux opèrent dans le mode de représentation réaliste et une certaine linéarité marque chaque mouvement narratif. Cependant, Tableau Ferraille emploie des flash-back pour raconter son histoire à travers les yeux de Gagnesiri. Ces éléments, aussi bien que de nombreux autres que la place ne me permet pas de détailler ici, nous permettent de placer un nouveau film comme Tableau Ferraille dans le cadre d'une continuité, complémentarité et révision en relation à un film antérieur tel que Xala, aussi bien d'ailleurs qu'avec un autre film sénégalais, Sey Seyeti (1980) de Ben Diogaye Beye.
Reou Takh (1972) de Mahama Johnson Traoré, Black Goddess (1978) de Ola Balogun et Asientos (1995) de François Woukoache sont reliés par leur sujet concernant l'esclavage et son héritage pour les africains aussi bien que pour les gens de la diaspora. Cependant les codes de représentation déployés par Woukoache se trouvent en contraste radical avec ceux utilisés par ses prédécesseurs, (nonobstant le flash back imaginaire des temps de l'esclavage dans Reou Takh et Black Goddess). Ces trois films privilégient un thème / motif de recherche. Reou Takh anticipe même partiellement Roots, la fameuse série TV de la fin des années 1970 aux États-Unis, puisqu'il s'agit de l'histoire d'un Africain américain qui retourne dans un Sénégal, maintenant indépendant, à la recherche de ses racines. Black Goddess est une sorte de Roots à l'envers. Un Nigérian retourne dans la Bahia contemporaine, au Brésil à la recherche des descendants de sa famille capturés et enlevés pendant la traite des esclaves. Pour l'aider dans sa quête, il transporte avec lui, une des bijoux jumeaux, qui fait partie de l'héritage familial, conservé au Nigeria. L'autre a été pris au moment de la capture. Armé de ce bijou, il arrive à retrouver sa famille de l'autre côte de l'océan, quand le bijou manquant est produit et identifié. Asientos est aussi un exercice du même type, imaginaire cette fois.
Dans Reou Takh, la visite de l'île de Gorée par le personnage africain américain, déclenche une série de flash-back. Ils nous plongent dans ce temps où l'île était un fort d'esclaves actifs, le dernier point de contact avec l'Afrique pour des millions d'Africains capturés ; en chemin par le passage du milieu vers le nouveau monde, et l'esclavage dans les plantations des Amériques. Les rencontres du personnage avec le Sénégal contemporain révèlent, aussi, le cruel héritage du colonialisme, cousin proche de l'esclavagisme, dans les inégalités sociales, les conflits et injustices rampantes de la société. Reou Takh reconstruit le passé africain et parle du présent dans le même souffle. Asientos répète cette construction, mais avec des différences. Le film retrace institutions et pratiques de l'esclavage et les insère dans le discours dominant de race et de capitalisme, en prenant le point de vue d'un jeune africain essayant de comprendre, de saisir, ce chapitre tenu secret de l'histoire.
Visuellement, le film révise l'image de l'île de Gorée, et par conséquent étend sa signification au présent. Comme Reou Takh, sa préoccupation la plus apparente est l'esclavage, considéré comme emblématique de la souffrance humaine. Le film pose des parallèles possibles avec les abus contemporains, commis sur les êtres humains en Afrique en général, avec des références visuelles à l'Éthiopie et au Rwanda. Il évoque le passé et le lie au présent, en interrogeant le futur. Au contraire du mode de narration réaliste et linéaire de Reou Takh, Asientos entreprend une tâche de mémoire, de reconstruction et de reconnections, par le moyen d'un collage habile et très imaginatif d'images disparates, de sons et de silences, de documentaire et de fiction, de juxtapositions, de montage en contrepoint, d'interpellation directe et de questions rhétoriques. Son style visuel et son rythme particulier dotent le film d'éléments formels qui marquent sa différence, sinon sa nouveauté.
Cependant en dépit de cette nouveauté Asientos porte certaines marques formelles et stylistiques du classique de Djibril Diop Mambety en 1972, Touki Bouki, aussi bien que de Soleil-O de Med Hondo.
Peut-être, comme on peut l'attendre de l'œuvre de n'importe quel réalisateur, peut-on trouver évident un certain nombre d'éléments de continuité, de révision, de citations, de recontextualisation ou de transformations, dans le travail ancien et moderne de Med Hondo, avec son engagement fondamental sur les questions d'immigration et de résistance. On trouve cela de la même manière dans le travail de Safi Faye, Hailé Gerima, Ousmane Sembène, Idrissa Ouedraogo, Djibril Diop Mambety etc. Le travail de Djibril Diop Mambety est particulièrement instructif dans ce sens, car si on regarde globalement ses films, depuis les premiers jusqu'aux derniers, de Contrast City, Badou Boy, Touki Bouki, Hyènes au Le Franc, les modes variés de relations, la continuité formelle et thématique, la révision ou la subversion entre elles s'imposent simplement d'elles-mêmes. Les manières de faire de réalisateurs plus jeunes (sénégalais et autres) qui se positionnent de manière - consciente ou pas - en lien avec les thématiques, le style, la conduite et l'orientation du travail de Diop Mambety, sont pour moi du plus grand intérêt dans le contexte de la discussion présente. Ceci inclut le travail de gens comme Ahmet Diallo, décédé malheureusement très jeune, de Jo Gai Ramaka et comme il est dit précédemment même de François Woukoache.
Boxulmaleen de Ahmet Diallo, 1991, en particulier, est clairement dans une relation de parodie et de révision de films comme Contrast City, Badou Boy et Touki Bouki, à la fois du point de vue du sujet et du style. Boxulmaleen construit une contre société dirigée par des pré-adolescents et des jeunes, une contre culture dont les mimiques parodient et transgressent, simultanément, les institutions, acteurs, normes, conventions et pratiques de la société établie, un sujet bien dans le ton de Diop Mambety. Le ton radicalement non conventionnel du film fait écho aux films de Diop Mambety.
Quelques cercles de critiques ont salué Dakan de Mohamed Camara (1997) comme le premier film africain à s'engager frontalement sur le problème de la sexualité homosexuelle. D'autres films récents comme ceux de Jean-Pierre Bekolo, Quartier Mozart (1992), Regina Fanta Nacro, Puk Nini (1994), Adama Drabo, Tafe Fanga (1997) et Safi Faye, Mossane (1996) ont été considérés comme des exemples de rejet des attitudes trop prudes face au sexe, à la sexualité, à la nudité dans le cinéma africain. Bien que réelles à un certain degré, la nouveauté et les différences habituellement attribuées à ces films devraient être mises en perspective.
Dans de telles discussions, il est vital de ne pas oublier les nombreux films précédents qui d'une façon ou d'une autre, ont préparé le terrain. L'exposition de l'homosexualité dans Dakan, revisite et subvertit le portrait quelque peu satirique et même stéréotypé de la sexualité homosexuelle africaine, offert par Touki Bouki, (Djibril Diop Mambety 1972) aussi bien que l'allusion furtive faite à travers le personnage d'un des serviteurs lors de la cérémonie de mariage dans Xala (Ousmane Sembène 1973).
Le déploiement audacieux de scènes d'amour hétérosexuelles - aussi bien que de la nudité masculine - dans les films d'Henri Duparc, Bal Poussière (1989), ou dans Taafe Fanga, et Mossane ou encore Fools (1997)du metteur en scène sud africain Ramadan Suleiman, (parmi d'autres), sont dans une relation de répétition et de révision de scènes similaires dans Touki Bouki ou le très controversé (et sexuellement explicite) Visages de Femmes, (Désiré Ecaré 1985), un film commencé dans le début des années 70 et terminé plus de dix ans plus tard en 1985.
Le corpus des films africains réalisés des années 60 au présent donne de nombreux exemples de répétition, de révision et de transformation, et nous pourrions multiplier les exemples. Ce qui rend ceci possible est le pouvoir, l'appel et l'ouverture, d'un grand nombre de pratiques de pensée et d'exemples, des pionniers du cinema africain, car à l'intérieur de leurs pratiques sont inscrits des éléments qui invitent à la répétition, à la révision, à la subversion, à la parodie, à la contestation et au changement. Je crois que nous pouvons obtenir une meilleure compréhension et une appréciation plus juste du cinema africain contemporain, particulièrement de ses innovations et de ses réalisations, avec de tels modèles de relations à l'esprit.

Mbye Cham

Department of African Studies
Howard University Washington, DC 20059
20 Septembre 1998