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Festival quotidien de films africains dans les villages
Cinéma Numérique Ambulant
critique
rédigé par Espéra Donouvossi
publié le 28/10/2007

Aujourd'hui l'Afrique se met à résoudre un problème lié à la circulation des oeuvres cinématographiques au sein du continent. De la distribution jusqu'à la diffusion, le circuit était fermé et seuls les privilégiés avaient le droit et la chance de voir des films africains. Depuis l'avènement des centres culturels initiés par la Francophonie, les jeunes africains commencent à voir leurs images et les films qui parlent de leur quotidienneté.
La nouvelle méthode qui semble être plus appropriée et directement tournée vers le public est de pouvoir créer des salles de cinéma à tout instant et n'importe où. Et c'est justement ce pour quoi le Cinéma Numérique Ambulant (CNA) est reconnu. Cela met la joie dans le cœur des Africains et promeut le cinéma africain qui était en perte de vitesse et de visibilité.

L'Afrique revoit ses images !!!
Le cinéma africain est resté pendant longtemps en Afrique une forme d'art inhabituelle ou qui n'existe presque pas. Du moins s'il existe, les Africains eux-mêmes n'ont pas un accès facile à ces œuvres cinématographiques qui parlent de leur histoire ou qui relatent leur quotidienneté. Des structures internationales et non gouvernementales ont mis des moyens colossaux pour que l'Afrique revoie ses images.
La Francophonie, le Ministère des Affaires Étrangères et de nombreuses autres structures européennes et américaines ont élaboré des plans de financement pour la production et la diffusion du cinéma africain en Afrique. Malgré ces moyens, le cinéma qui a semblé pénétrer en Afrique est resté l'histoire de quelques citadins des capitales africaines où la prolifération du cinéma hollywoodien et autres genres cinématographiques non identifiés se sont imposés à l'Afrique. Le développement des vidéos et des nouvelles technologies de l'information et de la communication et surtout la non disponibilité des œuvres cinématographiques africaines ont négativement agi sur l'émergence du cinéma africain du point de vue production distribution et diffusion. Des salles de cinéma ont vu le jour suite à un effet de mode il y a quelques années mais ne diffusant pas de films africains, n'ayant pas construit une politique en faveur des publics, cette mode n'a pas permis la pérennisation de cette pratique culturelle. Le cinéma est sorti des habitudes. Les salles de cinéma ont dû être fermés par la suite.

Les tentatives de solutions !!!
Pour pallier à cet état de chose, les administrateurs culturels africains initient dans presque tous les pays africains des festivals annuels de films africains. Le Bénin a aujourd'hui deux festivals de films, aucun d'eux n'a véritablement satisfait ou convaincu les Béninois de la nécessité de la production du cinéma africain. Du festival International de Ouidah (Quintessence) au Festival Lagunimages, l'effet est temporaire et ne se fait sentir que lors des festivals. Mais ces festivals restent importants pour une véritable organisation de la promotion d'une politique cinématographique. Ils constituent plus des écoles de cinéma avec les ateliers de formations qui sont animés lors des festivals. Ils permettent la visibilité des cinéastes et de leurs œuvres. Les centres culturels et représentations diplomatiques organisent périodiquement des festivals de films africains comme cela se fait dans les Centres Culturels Français au Bénin. Mais le problème se pose. En Afrique, on dit : ce n'est pas là où on est tombé qu'il est important de remonter mais à l'endroit où on a cogné le pied.

Savoir diagnostiquer le mal pour lui administrer les vrais remèdes !!!
Actuellement le Cinéma Numérique Ambulant (CNA) a su détecter la cause profonde. Faire passer dans tous les villages béninois des films africains et ce gratuitement en l'organisant avec les communautés à la base. Avec un important fond de films : comédies, sensibilisations, documentaires et fictions, le Cinéma Numérique Ambulant met la joie dans le cœur des enfants africains et aussi des grandes personnes qui sont fascinées par la magie du 7ème art. Projeter sur écran géant et en plein air des réalités africaines, est extraordinaire et fait rêver les villageois qui ont toujours pensé que le cinéma était destiné aux personnes aisées. C'est un véritable festival quotidien de films africain qui a cours dans déjà 4 pays, au Bénin, au Niger, au Mali et au Burkina Faso, le Cinéma Numérique Ambulant forme un grand public à la lecture d'images vers la promotion et l'émergence des salles de cinéma en Afrique. Le Cinéma Numérique Ambulant dispose aujourd'hui de huit structures de projections numériques.

Une mission, c'est des moyens !!!
Equipé à partir des évolutions technologiques liées à l'avènement du numérique, le CNA dispose de tout ce qu'il faut pour créer sur place et en plein air dans n'importe quelle zone excentrée ou enclavée des salles de cinéma. Véritable fête autour du cinéma. Avec un véhicule adapté aux conditions du terrain, un groupe électrogène silencieux, des lecteurs DVD et VHS, un vidéo projecteur, une sonorisation professionnelle, un écran géant de quatre mètres sur trois et un important fond de films de fiction. Cet arsenal technologique fait voir dans les villages des images de grande qualité. Après les travaux de la journée, les villageois qui n'ont pas accès à l'information, à l'électricité et privés de distraction se voient posé à leur nez et leur barbe, un écran géant qui diffuse comme par miracle des images magiques qui font rire et rêver. Un véritable outil de développement culturel et de développement social.
Quand un village est ciblé, il recevra 10 projections étalées sur une période de six mois.
Cette opportunité de communiquer par l'image dans des lieux excentrés, coupés des principaux moyens de communication est également saisie par plusieurs programmes gouvernementaux et ONG qui en partenariat avec le CNA organisent des projections spéciales portées sur des thèmes de sensibilisation bien définis. Que ce soit avec les comités de lutte contre le Sida, le paludisme, ou l'Unicef, plan international, Save the children et bien d'autres, le Cinéma Numérique Ambulant en même temps qu'il promeut le cinéma africain participe à la sensibilisation de la masse sur des graves problèmes qui minent l'Afrique

Des bonnes volontés et des effets !!!
Une telle structure faisant d'œuvres sociales et qui en même temps participe au développement du cinéma africain est principalement soutenu par les Coopérations, l'Union européenne, Africalia, TV5, RFI.
En 2003, le CNA a déjà organisé plus de 3.000 projections pour plus de 3 millions de spectateurs. Depuis quelques mois, le CNA s'agrandit et touche encore un peu plus de spectateurs, une nouvelle structure au Burkina Faso vient de commencer une tournée de projection. Les auspices d'une Fédération Africaine des Cinémas Numériques Ambulant (CNA AFRIQUE) sont lancés et l'Afrique repensera la façon la plus efficace d'organiser la distribution et la diffusion de films africains en Afrique

Et les réalisateurs africains ?
Même si le CNA ne s'inscrit pas sur un territoire concurrentiel et que les projections sont sans contrepartie financière pour les spectateurs, il est important de noter que les droits d'auteurs sont négociés avec les réalisateurs et distributeurs avant la diffusion des films. Ceci est un principe cher au CNA même si à des moments donnés des incompréhensions surgissent encore entre certains distributeurs qui n'acceptent pas la démarche du CNA. Mais toujours est-il que le respect des créateurs des œuvres est un principe cher au CNA.

Tout n'est pas toujours rose !!!
Le CNA doit toujours repenser sa politique des publics….
Les villages sont certainement importants mais il faut privilégier à mon avis des jeunes étudiants et scolaires qui sont les plus crédibles aux yeux des parents restés aux villages. Donc dans les circuits de projection le CNA doit identifier et repérer des écoles avec lesquelles, les débats à la fin des films de sensibilisation pourront avoir un sens au sein des villageois. Encore il faut rappeler que le cinéma n'est pas aussi connu dans les zones urbaines et que le CNA doit penser à travailler avec les centres de formations des jeunes.
En dépit de tout, le cinéma africain est entrain d'être sorti de ses cendres.
De 2001 à 2006, au Bénin le CNA a réalisé 1.200 séances pour 370 villages du Bénin. Le score que la somme des projections de tous les festivals de films africains n'ont pas encore atteint.
En étant tous les soirs sur le terrain, les CNA touchent un public plus large et plus nombreux que ceux des festivals de cinéma du continent.
La démarche des CNA est d'aller à la rencontre d'un public de non initiés et ainsi s'inscrit pleinement dans le développement de la filière cinématographique en permettant par l'image de rapprocher les peuples et les différentes cultures du continent en proposant des films de qualité qui invitent à la réflexion et au voyage.

Espéra G. DONOUVOSSI

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