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Le retour du jazz à la souche
Retour à Gorée, Pierre-Yves Borgeaud (Suisse)
critique
rédigé par Cheikh Seydi Bodian
publié le 15/01/2008

Retour à Gorée est un film des nombreux films qui ont été diffusés lors de la 9è édition du festival du film de quartier qui s'est déroulé à Dakar du 12 au 17 décembre dernier. Acteur principal dans le long-métrage, le chanteur sénégalais du mbalax, Youssou Ndour, a pour défi de ramener le jazz à sa source : l'Afrique.

L'Afrique n'a certainement pas besoin de faire revenir dans sa terre nourricière tout ce dont elle avait été sevrée, tout ce qu'on lui a pillé ou encore volé. Parmi ces nombreux éléments, l'Occident a déporté ses Hommes, pas les moins intelligents ni les moins forts, au contraire, et avec eux leur art, dont la musique.
"Rendez à César ce qui appartient à César, et à Dieu ce qui appartient à Dieu" a dit Jésus Christ. Aussi, en chœur les Africains devraient alors dire : "Rendez à l'Afrique ce qui appartient à l'Afrique". Nous estimons qu'il était important de rappeler ce point d'histoire pour comprendre un peu Retour à Gorée. Ou encore, retour à "l'île symbole de la traite négrière". Long-métrage de 108 minutes, Retour à Gorée est un documentaire musical du réalisateur suisse Pierre-Yves Borgeaud. La Suisse étant un pays connu pour sa "neutralité"… A-t-il la prétention de rétablir à sa manière une partie de justice ? On serait tenté de le croire, et il aura réussi à s'acquitter d'une partie de la grosse tâche qui incombe aussi aux Africains, notamment, aux écrivains, aux historiens, aux géographes, aux archéologues, aux réalisateurs et cinéastes, etc.
Le défi de l'acteur principal, dans le film, Youssou Ndour, par ailleurs lead vocal du Super étoile - "rapporter en Afrique un répertoire de jazz (…), en hommage aux victimes de l'esclavage" - est d'emblée relevé. Pour la simple raison que notre homme est parti dans son périple, aux États-Unis et en Europe, avec les armes qu'il maîtrise le mieux. Celles de la musique : "Parler serait difficile, mais je peux chanter", a dit en substance Youssou Ndour, surnommé roi du mbalax dans l'arène musicale sénégalaise. Et tout au long du film, il va chanter pour aller à la recherche du jazz. Mais comme You' fait du mbalax, autant dire que le mbalax va chercher le jazz ou alors la musique va chercher la musique. Alors la musique trouvera la musique. C'est d'autant plus vrai que toutes les paroles musicales (déjà chantées dans la rythmique mbalax) de You ont pu être chantées avec tous les instruments qu'il a trouvé sur place, d'Atlanta à Dakar en passant par New Orléans et New York. De même le chanteur atteste ses prédispositions à arriver à ses fins, puisqu'il dit lui-même que quand il entend le latino et le jazz, il a "l'impression de vibrer".
En revanche, le réalisateur a-t-il pour autant pensé au cinéphile ? Pas tant que ça, à notre avis. En effet, à l'antipode de Youssou Ndour qui peut chanter, le cinéphile, pour mieux comprendre la trame du film, aurait peut-être besoin de beaucoup plus de dialogue et, par conséquent, moins de musique. Parce qu'après tout, c'est pour lui qu'est destiné le film.
Autre fausse note du réalisateur, c'est d'avoir prolongé la fin de son film. La séquence du concert final est un superflu qui n'aurait pas dû exister. Comme Retour à Gorée, le jazz a été la musique chantée par les compagnons de Youssou Ndour à leur arrivée à Gorée, plus exactement, à l'endroit de "la porte du voyage sans retour". Mais une fois rentrée par celle-ci - dorénavant porte du voyage du retour - les paroles de leur chant ont été : "Je suis en paix dans mon propre pays". Et là, c'est le jazz qui parle de son "Retour à Gorée".

Cheikh Seydi BODIAN

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