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Le carré d'as qui mérite le grand prix du festival
Compétition longs métrages à Quintessence 2008
critique
rédigé par Espéra Donouvossi
publié le 27/01/2008

Daratt de Mahamat Saleh Haroun, Il va pleuvoir sur Conakry de Cheik Fantamady Camara, Teranga Blues du doyen Moussa Sène Absa et Sentence Criminelle du Camerounais Victor Onana : voilà les quatre films en compétition qui ont rendu difficiles les pronostics.

Daratt de Mahamat Saleh traite de la vengeance apaisée dans un langage cinématographique bien codé. Violence et tension sont vécues par le public tout le long du film. La fin est évocatrice pour tous les pays sortis de conflits. Un film qui sort de l'ordinaire avec des leçons de vie bien précises, Daratt est un bijou qui a une grande facture artistique et cinématographique. Les plans, les images et le discours porté par les comédiens sereins, sont autant de choses qui font de cette œuvre un exercice pratique de cinéma pour ceux qui savent lire l'image. Le réalisateur confirme son talent de grand réalisateur africain après Bye bye Africa et Abouna qui lui ont valu plusieurs prix dans les plus grands festivals internationaux. Sa présence dans les festivals en Afrique et dans le monde entier ne manque pas de faire de lui un grand réalisateur bien connu des publics. Quand le cinéma commence par parler un langage universel, il devient un important outil de développement social et c'est de cela qu'il est question chaque fois que Mahamat Saleh Haroun prend sa caméra pour montrer la vie pour en condamner le mal ainsi que suggérer le bien.

Il y a un autre film qui séduit tout le monde et qui ose (avec des scènes de nudité) dénoncer les scènes hypocrites qui caractérisent la quotidienneté de la société africaine qui cache ce qui est su. Partout il est projeté, ce film draine toujours un monde fou de jeunes qui l'apprécie toujours : il a eu le prix Rfi du public au Fespaco 2007.
Il s'agit du film guinéen Il va pleuvoir sur Conakry de Cheick Fantamady Camara, ce film révolutionne la thématique tradition modernité longuement traitée dans le cinéma africain. Si ce thème est récurrent dans le cinéma africain, c'est parce que l'ampleur qu'il prend, mérite qu'on en parle sur toutes ses formes. C'est justement ce qu'a essayé de faire le réalisateur guinéen et dans un langage sobre que connaissent toutes les couches sociales. Que ce soit les politiciens, les hommes de culte, les modernistes et les traditionalistes, le film de Fantamady Camara touche toute la société africaine qui se retrouve forcément à travers l'œuvre qui récolte des prix dans tous les festivals où il est projeté.

Depuis Madame brouette et Tableau ferraille, un créateur fait son apparition dans l'univers de la cinématographie africaine. À côté de la peinture qu'il aime bien, la révélation de 1983 adopte le cinéma. Dans son élan d'artiste universel, Moussa Sène Absa réalise Teranga Blues, un film dont l'inspiration lui était venue des refoulements des sans papiers en France. Quel malheur y a-t-il de revenir chez soi ? La réponse à cette question s'est transformée en une fiction où le réalisateur crée son monde. Le scénario sélectionne les citoyens de son monde pour se faire aimer de tous les spectateurs du monde entier. Lord Aladjiman, le rappeur sénégalais qu'il fait jouer, n'est qu'une stratégie pour mettre au premier plan quelqu'un en qui les jeunes ont confiance et auquel ils s'identifient. Le rap étant une musique de jeunes en quête d'épanouissement et de liberté, ce film ne manque pas d'accrocher les jeunes du monde entier. Projeté au Fespaco en 2007 et à Quintessence en janvier 2008, ce film suscite des débats de part et d'autre pour comprendre la quintessence d'un tel chef d'œuvre. Le réalisateur toujours présent sur les lieux de projection ne se lasse jamais de répondre aux curieux et éveillés emportés par son film. Un film adorable et le public béninois n'a pas manqué de lui décerner un prix spécial au cours du festival international du film de Ouidah.
Mais ce Prix du public suffit-il pour parler d'une sentence ?

Victor Onana (Prince Dubois) donnera la réponse avec son film Sentence Criminelle qui, dans un beau scénario, parle de la justice populaire en cours tous les jours dans les grandes capitales africaines. Une justice sans jugement avant condamnation. La vie de tous les jours n'est-elle pas faite de cette justice brute et immédiate ? L'anarchie et le désordre où tout le monde veut être roi. " Ce film est inspiré de l'histoire réelle d'un de mes amis qui a été molesté par la population. Il allait rendre visite à une personne qu'il connaissait bien, mais alors, il y a eu une méprise. On a crié au voleur et la population s'est ruée sur lui et l'a roué terriblement de coups" disait le réalisateur. Le cinéma n'est alors que la transcription de la vie de tous les jours. Le critère de proximité, le scénario bien réalisé, les atouts techniques et les belles images font accorder à ce film un regard spécial plein d'attention. Le réalisateur qui est à sa première expérience en matière de long métrage et qui est un monteur de formation augure de bons auspices pour le cinéma africain.

Mais la sentence du jury rendue à la sixième édition du festival international du film de Ouidah ne pourra s'échapper au charme de ces quatre films qui ont su remporter chacun un prix. Le palmarès du festival est révélateur. Parmi les meilleurs, il y a toujours un gagnant…

Espéra DONOUVOSSI

Article paru dans Quintessence Actu n°2 (Ouidah), du Jeudi 10 Janvier 2008.

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