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"Mon rôle est d'être le chef d'orchestre…"
Interview avec Samantha Salvy, assistante réalisatrice
critique
rédigé par Sitou Ayité
publié le 07/03/2008

Samantha Salvy, 28 ans est une Franco-togolaise. Elle est assistante réalisatrice à Paris où elle vit et elle est à Lomé pour mettre ses vacances à profit. Elle nous parle de son métier et de son parcours.

1 - Explique nous ton métier, Samantha

Samantha Salvy : En gros je suis assistante réalisatrice ou assistante mise en scène. Disons que mon métier est un métier charnière. Il y a plein de corps de métiers différents sur une équipe de cinéma ; mais pour expliquer mon travail, disons que dans la hiérarchie, il y a un réalisateur qui est à l'origine d'un projet de film. Il va faire appel à un producteur qui va s'occuper de trouver de l'argent. Ensuite le réalisateur va faire appel à une équipe technique composée de machiniste, de costumier, d'électricien, de maquilleur, bref tout ce monde qu'on peut trouver sur un plateau. Et pour coordonner tout ce monde, le réalisateur a besoin d'un assistant réalisateur. C'est là où j'interviens. En résumé synthétique, mon rôle est d'être le chef d'orchestre de l'équipe technique parce que je dois coordonner plein de corps de métier qui n'ont rien à voir les avec les autres, je suis un pivot en fait. Je traduis le langage du producteur aux techniciens.

2 - Pratiquement sur un plateau de tournage, comment ça se passe ?

Samantha Salvy : Ce métier se déroule en 3 étapes.
D'abord, le réalisateur doit me dépiauter tout ce qu'il entend faire afin que je puisse m'organiser dans mon plan de travail. C'est l'assistant réalisateur qui fait le plan de travail. Si par exemple le réalisateur veut une telle lumière à tel endroit, c'est à l'assistant réalisateur de l'expliquer au chef opérateur qui à son tour donne ses prérogatives techniques que je note. Si par exemple, le coiffeur doit arriver à 4 heures du matin pour faire son chignon qui dure 3 heures de temps, je dois l'avoir pour organiser mon plan de travail.
Ensuite, pendant le tournage, l'assistant réalisateur se charge de faire respecter le plan de travail qu'il a établi lui-même, le mieux possible.
Enfin à la post production, l'assistant réalisateur intervient très peu. Le gros de son travail est généralement dans les deux premières étapes. Il vérifie si toute la matière du plan de travail est accomplie.

3 - Devient-on assistant réalisateur par faute d'être réalisateur, ou c'est un métier à part entière ?

Samantha Salvy : En fait il y a 2 sortes d'écoles. En France, la plupart des gens qui veulent faire de la réalisation doivent passer par l'assistanat réalisation mais aux États-Unis par exemple, c'est un métier à part entière. Ça dépend de comment on se place dans ses perspectives professionnelles.

4 - Parle nous de ton parcours.

Samantha Salvy : En ce qui me concerne, j'ai passé un bac scientifique, science et technique de laboratoire, ensuite un BTS en qualité industrielle agro-alimentaire et bio-industrie. Mais travailler dans ce domaine ne m'inspirait pas vraiment. Par contre, j'adorais écrire et je me suis dis pourquoi ne pas m'inscrire dans une école de cinéma pour apprendre à écrire des scénarii ? C'est là que ça a démarré. J'ai donc trouvé un contrat de qualification dans une école de cinéma, EICAR, à Paris et j'ai fait la section réalisation parce que c'est ce qui me permettait d'apprendre à écrire un scénario. Avec la section réalisation, j'ai pu toucher à tout, mais j'ai une vraie passion pour l'assistanat réalisation.

5 - C'est quoi ce contrat de qualification ?

Samantha Salvy : Il s'agit de trouver un entrepreneur qui te prend à mi-temps et te donne un maigre salaire par mois en échange de quoi l'AFDAS, qui est un groupement en France, finance ta formation. C'est comme ça que j'ai pu entrer à EICAR parce que c'est une école qui coûtait une fortune, et moi cette fortune je ne l'avais pas mais je voulais quand même y aller. Alors mon entrepreneur à cette époque qui était Jean Jacques BEINEIX m'a prise pour bosser dans sa boîte.

6 - As-tu réalisé des films dans ta carrière ?

Samantha Salvy : J'ai pu faire de tous petits films d'école, parce que j'avais le matériel d'école à disposition. En plus, en fin d'année, il y avait un petit concours de scénario organisé par l'école et les autres élèves devaient travailler en équipe sur la réalisation du scénario gagnant.
C'est comme ça que j'ai pu bosser sur les films d'école de mes camarades en tant qu'assistante réalisatrice parce que j'étais la seule à travailler en entreprise, donc plus dégourdie que les autres. C'est là où la passion est née en fait.

7 - Espères-tu devenir réalisatrice ?

Samantha Salvy : Je n'ai pas choisi l'assistanat réalisation parce que je me dis que je serai plus tard réalisatrice. L'assistanat réalisation est un métier qui me plaît parce que ce métier demande des compétences assez diverses et il exige beaucoup de communication car je dois traduire comme je l'avais dit le langage du producteur aux techniciens parce que les deux parties ont des contraintes et des attentes différentes. Pour tous les films de mes potes, j'ai été assistante réalisatrice et mon rêve est de travailler sur de grands plateaux de tournage en tant qu'assistante réalisatrice.

8 - Quelles sont les difficultés quand on sort d'une école de cinéma à Paris ?

Samantha Salvy : Tant que tu es à l'école, tu peux réaliser de petits trucs mais dès que tu sors, tu ne connais pas toujours ton métier et si tu te présentes devant un producteur avec ton diplôme, il rigolera tout debout. Je vais te donner des chiffres qui sont très parlants, dans ma promotion, on était 90 en première année et 60 sont sortis de la 3ième année et ça fait huit ans que j'ai quitté l'école et on est à peine 5 à travailler encore dans l'audiovisuel. C'est un métier où au début il faut travailler gratuitement. Travailler gratuitement, c'est sympa quand tu as 20 ans mais après quand tu devras couvrir tes besoins, ça devient très difficile. Ma chance à moi est que je travaillais en même temps que j'allais à l'école.

9 - Si on se base sur ce chiffre, comment peut-on expliquer les films qui sortent chaque semaine en France ?

Samantha Salvy : À part le grand nombre d'écoles privées de cinéma qu'il y a à Paris, il y a deux écoles publiques : Louis lumière et la FEMIS qui sont très connues et où on ne paie pas mais le niveau de sélection est très haut. Par exemple ils ont 10 000 demandes par an pour une classe de 5 élèves. Donc les gens qui sortent de ces deux écoles travaillent directement dans le monde du cinéma et arrivent donc à gravir les échelons.

10 - Tu viens faire un film au Togo, es tu en train de réaliser ton rêve d'assistante réalisatrice ?

Samantha Salvy : Je suis venue faire un film mais je te l'ai expliqué tout à l'heure, mon rêve est de devenir assistante réalisatrice. Je travaille dans l'audiovisuel et dans mon métier on rencontre des gens. Je suis franco togolaise donc métisse et je ne voulais pas revenir dans mon pays pour les vacances comme ça et repartir, ça ne me sert à rien. La dernière fois que je suis venue, il y a 3 ans, je suis repartie avec une idée avec laquelle je reviens faire un film. C'est cette passion pour mon métier d'assistanat réalisation qui m'a conduite à réaliser ce film que je viens tourner chez moi au Togo.

Sitou Ayité

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