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Une caricature-moquerie sous l'histoire
Le dernier roi d'Écosse, de Kevin MacDonald
critique
rédigé par Bassirou Niang
publié le 08/03/2008
Forest Whitaker
Forest Whitaker
Forest Whitaker dans  Le dernier roi d'Ecosse (The Last King of Scotland)
Forest Whitaker dans Le dernier roi d'Ecosse (The Last King of Scotland)
Forest Whitaker est le Général Idi Amin Dada
Forest Whitaker est le Général Idi Amin Dada
Kerry Washington, Forest Whitaker et James McAvoy
Kerry Washington, Forest Whitaker et James McAvoy
Forest Whitaker et le réalisateur Kevin Macdonald (photo de tournage)
Forest Whitaker et le réalisateur Kevin Macdonald (photo de tournage)
Forest Whitaker, Gillian Anderson et James McAvoy
Forest Whitaker, Gillian Anderson et James McAvoy
James McAvoy (Nicholas Garrigan) et Forest Whitaker (Gl Idi Amin Dada), entouré de dignitaires du régime.
James McAvoy (Nicholas Garrigan) et Forest Whitaker (Gl Idi Amin Dada), entouré de dignitaires du régime.
James McAvoy et Forest Whitaker, entouré d'enfants
James McAvoy et Forest Whitaker, entouré d'enfants
Forest Whitaker (Amina Dada)
Forest Whitaker (Amina Dada)
Kevin Macdonald
Kevin Macdonald
Forest Whitaker et James McAvoy
Forest Whitaker et James McAvoy
Forest Whitaker primé
Forest Whitaker primé

On eut comparé métaphoriquement ce film au rire moqueur d'un anthropologue attardé qui a eu le sinistre plaisir, en déposant ses pénates en Afrique, d'observer la "négraille" d'une Ouganda exsangue avec des yeux médusés. Voilà vulgairement soupçonnée l'intention du réalisateur Kevin Macdonald.

Adapté d'un roman portant le titre du roman éponyme de Gilles Foden, Le dernier roi d'Écosse, le film, un drame de 125 mn présenté au public le 28 février dernier par le ciné club de la Fondation Konrad Adenauer, met à nu, sur le mode de l'exagération, avec une caricature passionnée, le comportement d'un président ougandais que tout écarte de l'humanité. Et Kevin MacDonald ne le fait mieux qu'en usant de deux paramètres : celui verbal et celui comportemental.
Idi Amin Dada, tel que présenté, prononce des mots en rapport étroit avec le caractère ingénu de son mental. Après une danse guerrière sur scène lors d'une visite aux populations d'un village, au lendemain d'un coup d'État, le nouveau président dévoile son être. "Dans mon cœur, je suis un homme normal comme vous". Une telle phrase convoque même le sentiment d'anormalité. Ainsi dès les premières scènes du film, Kevin Macdonald, crée une méfiance et une animosité du spectateur à l'égard du président, lesquelles devront rester intactes jusqu'à la fin.
Même si beaucoup des séquences sont inspirées de l'histoire réelle de l'Ouganda, on note quand même une exagération dans cette tendance à insister sur le caractère burlesque prêté à Idi Amin Dada. Tout au long de ce film, revient en filigrane, au gré de la volonté de son réalisateur, l'identité de névrosé d'Amin Dada qui, en s'épanchant devant son "médecin personnel" et "plus proche conseiller" Nicholas Garrigan, venu d'Écosse pour "changer de vie", retrace l'itinéraire désespérant de son enfance : il se présente comme membre d'une famille pauvre et comme un enfant abandonné par son père. Point d'appui pour le réalisateur, se faisant sans doute passer pour un anthropologue doublé d'un psychanalyste, pour le dépeindre sous les contours d'une catastrophe humaine. Et au summum du constat, le président n'est rien d'autre qu'un pauvre nègre au mental primitif se plaisant à fréquenter les bars, entouré de femmes, et à prendre la parole à tout moment, sans prouver ses capacités à conduire l'Ouganda vers des lendemains meilleurs. Il occupe seul l'espace de parole et celui de silence. Sans risque d'être trop fort, le président souffre de dégénérescence… Seul lui incombe le désir de paraître. Voilà qui en explique la multiplicité des plans rapprochés en vue de mettre en relief non seulement ce visage repoussant que trahit un œil déformé par une blessure, mais aussi un regard cachant une sorte de sécheresse d'une conscience malade.
Le rire à la tonalité animale du président est aussi un signe que porte le son au spectateur, juste pour le "défendre" (?) d'avoir une quelconque sympathie pour son auteur. Il symbolise quelque peu le caractère inhumain d'Amin Dada qui extermina sous son règne près de 300 mille personnes. "Dans les campagnes, on ne creusait plus des tombes", laissait entendre une voix dans le film, avec à l'appui des images et photos d'archives utilisées par le réalisateur. Une cruauté offerte au regard.
Et pourtant, par une ironie des plus déconcertantes, le dictateur en étonne plus d'un lorsqu'il déclare que "le peuple ougandais n'a vraiment pas à rougir de son histoire".
Ce que l'on en retient, c'est simplement, qu'en aucun moment, dans ce long métrage, il n'a été magnifié un aspect positif chez Amin Dada. Comme pour en légitimer l'argument des Anglais qui présentent ce dernier comme "un malade mental".
Tradition, dirait-on d'un recours aux poncifs sur les rois et empereurs africains. Le dernier roi d'Écosse est juste un film qui n'éduque en rien pour ne faire finalement que caricaturer. Son unique prouesse.

Bassirou NIANG
SENEGAL

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