AFRICINE .org
Le leader mondial (cinémas africains & diaspora)
Actuellement recensés
24 939 films, 2 562 textes
Ajoutez vos infos
Le scénario Adil Imam
Morgane Ahmed Morgane, de Youssef Maati (Égypte)
critique
rédigé par Mohammed Bakrim
publié le 02/04/2008
Adel IMAM
Adel IMAM
Halim
Halim
Imaret Yacoubian
Imaret Yacoubian

Le box office marocain de l'année 2007 place le cinéma égyptien en quatrième position après les USA, l'Inde et le Maroc. Il fut un temps où le cinéma égyptien caracolait en tête, en véritable concurrent du cinéma hollywoodien. Là, il occupe une modeste quatrième position très loin du Maroc avec à peine 5% des entrées. C'est grâce notamment à Halim de Chérif Arafa arrivé en 14ème position en termes d'entrées que ce cinéma a pu retrouver le public du grand écran étant bien entendu que ce cinéma est largement servi à domicile via des chaînes satellitaires thématiques : le cinéma égyptien, y compris chez lui, est devenu majoritairement un cinéma dépendant du petit écran. Un film important sorti en 2006, Immeuble Yacoubian de Marwan Hamed, distribué chez nous en 2007, n'a pas réussi à s'imposer et ne figure pas parmi la listes des trente premiers films de l'année écoulée. Sorti au mauvais moment, concurrencé par la copie piratée, le film évènement de ces dernières années en Egypte n'a pas eu le succès attendu et artistiquement mérité.

Cependant, le début de cette année 2008 apporte une bonne nouvelle au distributeur de film égyptien au Maroc. Morgane Ahmed Morgane est en train de réaliser un record d'entrées. Sorti simultanément avec une vague de films marocains, il semble les devancer en nombre de semaines de présence à l'affiche.
Qu'est-ce qui explique ce succès ? Y a-t-il un retour d'engouement pour le cinéma du pays du Nil ? Il faut signaler de prime abord, que ce cinéma, qui vient de célébrer en 2007 son centième anniversaire, est en train de vivre un regain suite à des mutations structurelles qui touchent à son économie principalement.

De nouveaux modes de financement sont en train de permettre au cinéma égyptien de retrouver et les salles et son public. On peut signaler à ce propos l'arrivée du Groupe Good News 4 Film qui a été derrière les récents succès du cinéma égyptien sur la base d'un schéma entreprenarial qui mise essentiellement sur de gros investissements. À chaque production, c'est un nouveau chiffre record qui est enregistré. Halim, comme Imaret Yacoubian font partie des films les plus chers de l'histoire du cinéma égyptien.

Du coup, quelque chose est en train de changer dans le paysage du cinéma égyptien avec le retour au grand écran de ses monstres sacrés. Il y a une vingtaine de nouveaux films qui se préparent dans le sillage de cette dynamique de production. Morgane Ahmed Morgane est formaté en fonction de ces nouveaux critères : grosse production, beaucoup de moyens, un scénario en béton et des méga stars… notamment une locomotive qui continue de fonctionner à plein régime, Adil Imam.

La mise en scène obéit à une logique de chemin de fer : être au service de l'histoire qui est elle-même construite autour d'une figure centrale, le héros individuel. Morgane Ahmed Morgane peut se lire d'ailleurs comme une métaphore de cette figure paternelle qui plane sur le cinéma égyptien.
Le récit s'ouvre avec l'arrivée de Morgane Ahmed Morgane, un richissime homme d'affaires dans les bureaux de sa compagnie. Tout le monde se met au garde à vous, par respect ou par crainte. Car, très vite, la scène d'exposition nous apprend que ce Monsieur ne parle qu'à coup de liasses de billets de banque. Le contrôleur financier qu'il découvre en train de piocher dans ses comptes en ressort ébloui et … acheté. Car, dans les affaires, on ne résiste pas à Morgane Ahmed Morgane, comme dans le cinéma on ne résiste pas à… Adil Imam. Sauf qu'il y a une nouvelle génération qui aime le luxe mais aimerait en plus avoir le prestige intellectuel et artistique. Ce sont les enfants de Morgane. Interprétés par deux jeunes comédiens qui montent, Bassma et Chérif Salama, ils sont le lien générationnel avec la montée du nouveau cinéma numérique en vogue chez les jeunes. Dans le film, ils sont étudiants, carrément engagés sous l'influence de leur professeur Jihane, femme de principe, attachée aux valeurs. Elle est interprétée par Mervet Amin qui signe ici son retour au cinéma après plus de vingt ans d'absence!

Un schéma dramatique primaire est ainsi dessiné: un sujet qui cherche à tout acquérir par la seule force de l'argent est confronté à un opposant. Ce conflit basic va donner lieu à un véritable passage en revue des maux de la société égyptienne. C'est le versant démagogique et populiste du film : tout y passe. La corruption, l'hypocrisie, l'intégrisme, la cupidité… les manipulations politiques. Ses enfants lui demandent de rehausser son image intellectuelle, il achète des poèmes et édite un recueil… ils veulent le voir académicien, il finance des travaux à l'université et se voit réussir sans effort. Sauf que le film veut quand même rassurer sur la bonne morale et la résistance de Jihane va finir par payer, puisque Morgane se découvre des capacités intellectuelles qui vont lui permettre de réussir un vrai cursus universitaire. Au détriment du vraisemblable. Mais ce n'est pas là le but de l'opération. Celle-ci consiste plutôt à réconforter un schéma classique de la comédie populaire autour d'un numéro, celui du maître des lieux qui fait bouger le monde comme avec une baguette magique. La caméra, comme le spectateur, est assignée à résidence, c'est un cinéma de la grande consommation. Adil Imam est le scénario du film.

Cela semble plaire, tant mieux, surtout si cela se fait revenir le public dans les salles de cinéma.

Mohammed Bakrim

Films liés
Artistes liés
Structures liées