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Baara, de Souleymane Cissé (Mali)
Le vécu des couches vulnérables face aux nantis
critique
rédigé par Justin Amoussou
publié le 05/01/2009
Souleymane Cissé
Souleymane Cissé
Souleymane Cissé, 2008
Souleymane Cissé, 2008

Les dures conditions de travail dans les entreprises installées en Afrique, et la corruption des patrons sont souvent à l'origine de multiples mouvements de débrayage observés çà et là. L'un des plus grands mérites du film Baara du cinéaste malien Souleymane Cissé est d'offrir une copie de la vie africaine comme on ne l'a pas souvent vu sur les écrans. La suite ordonnée des images vivantes en est une illustration.

Un gros plan du dos de Balla Diara, l'un des personnages connu sous son surnom "Baara" qui signifie "porteur de bagages" ouvre le film de Souleymane Cissé projeté au Centre culturel de Cotonou, le jeudi 7 février 2008, dans le cadre du festival "Les Étalons de Yennenga" qui a pris fin le 28 février. Le regard plongé de "Baara" dans l'obscurité (il tourne le dos à la caméra) exprime fort bien les sentiments de ce dernier, jeune paysan de son état et qui désormais doit gagner sa vie comme porteur dans une usine, ce qui lui a valu d'être surnommé "Baara". Tel un porteur de masque, personne ne peut imaginer l'humeur de "Baara" dans cette obscurité. Sourit-il ou pleure-t-il ? Bien malin qui pourra deviner. Seulement le noir qui se dresse devant lui renseigne, un tout petit peu, sur son avenir incertain. La prise de vue frontale renforce l'originalité de la technique du réalisateur Souleymane Cissé.

Pendant 93 minutes, le premier long métrage produit à Mali en 1978 par le réalisateur Souleymane Cissé, va dénoncer le diktat des patrons de sociétés qui s'enrichissent par l'exploitation de leur personnel. Dès lors, l'application des méthodes démocratiques vont, à coup sûr, déranger.
C'est justement le cas de Balla Traoré, le jeune ingénieur, rentré fraîchement d'Europe et qui travaille dans une usine de Bamako. Il embauche "Baara" comme manœuvre. Les dures conditions de travail y provoquent la révolte des ouvriers. Le PDG, Makan Sissoko, se moque du sort de ses employés. L'ingénieur, qui a fait ses études en Europe, tente d'appliquer ses idées libérales au sein de l'usine. Alors, il s'oppose au syndicat "maison", soumis au patron, et entre en conflit avec la direction de l'usine. Grâce à lui, les ouvriers bénéficient non seulement des avantages liés à leur métier, mais aussi des conditions de travail plus humaines. Un jour, il décide d'organiser une réunion avec les ouvriers. Mais, c'est sans compter avec la colère de Sissoko qui le fait aussitôt enlever avec toutes les conséquences tragiques qui en découlent. Son ami Balla Traoré ainsi malmené, "Baara" se retrouve de plus en plus face à la violence.

Ce film a valu au cinéaste malien l'Étalon de Yennenga, grand prix du Festival Panafricain de Cinéma de Ouagadougou (Fespaco) en 1978. À ce jour, Souleymane Cissé est le seul cinéaste qui a remporté deux fois l'Étalon de Yennenga. Puisque, après Baara, la sortie du film Finyè (Le vent, 1982) du même réalisateur a multiplié les récompenses : Étalon de Yennenga au Fespaco en 1983, Tanit d'Or au Festival de Carthage, Sélection officielle au Festival de Cannes 1982. Il s'agit d'une chronique sur la révolte des étudiants maliens face au pouvoir militaire.

Justin AMOUSSOU

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