C'est une mère désespérée dont le garçon et la fille ont rejoint le peuple corvéable des enfants sans défense. C'est un père cupide qui est à la base de l'innommable. C'est enfin une société où la lutte acharnée d'une femme seule sent le combat perdu d'avance. Dans le fléau de placement d'enfants, le silence est d'or et la connivence empoisonnée par l'argent. Comme dans tout commerce, le marchandage peut être dur mais on finit par s'entendre sur l'essentiel : voler l'innocence des enfants en les mettant dans un travail plus fort que leur âge.

Abi, mère meurtrie qui a osé frapper son mari en guise de protestation à son acte impardonnable (il a vendu ses propres enfants), subit pour cela une séance de purification. Il en faut plus pour enlever à cette femme le goût de retrouver ses deux gosses. Elle abandonne le village pour la ville où ses recherches vont dans tous le sens, s'intéressent à toutes les directions.

Dans un autre temps, celui de tous les cauchemars, son petit garçon Abi, apprenti mécanicien dans un garage, et sa fille Yawa, soumise aux assauts sexuels de son patron, font la douloureuse expérience des enfants domestiques. Thème poignant, regard sans complaisance sur un laisser faire massif.

La réalisatrice de cette fiction réussit le tour de force d'entremêler les intrigues, de les faire rugir au bon moment pour doser la marche palpitante du récit. Le merveilleux jeu des jeunes acteurs accroche, quand les destins éclatés des membres d'une même famille dévoilent en arrière plan la mise en lambeaux de nobles principes. Le film chagrine, indigne, révolte, amuse, évalue la passivité d'une société qui tarde à ouvrir les yeux sur un drame bien réel : celui de ses milliers d'enfants vendus comme du bétail.

Ce film de 104 minutes est en compétition au FESPACO 2009, Catégorie TV Vidéo.

Fortuné Bationo