La Berlinale fête son 60ème anniversaire en rendant hommage à Éric Rohmer récemment disparu et en présentant une pléiade de films venus de Chine, territoire désormais en duel d'égal à égal avec la machine cinématographique d'Hollywood.

Deux évènements au moins cette année : retour du grand cinéaste pékinois Zhang Yimou, auteur du mythique Hero (c'est lui aussi qui a mis en scène les cérémonies d'ouverture et de clôture extraordinaires des jeux olympiques de Pékin) avec cette fois-ci un thriller, remake d'une série B américaine Blood Simple: A woman, a gun and a noodle shop. Un film paraît-il rempli de frissons.
À l'ouverture du festival, un autre sujet d'émotion (chinois) filmé par Wang Quanan : Apart Together, sur le retour à Shanghai cinquante ans après d'un vieux soldat de Tchang Kai Shek venu de Taïwan. Un retour qui n'a rien à voir avec le tourisme (des liaisons aériennes ont été établies entre l'ile et le continent), le vieux soldat est à la recherche de la femme qu'il a aimée et qui était enceinte lorsqu'il a fui avec l'armée nationaliste.
Sous le signe aussi du frisson extrême, il y a à Berlin le nouveau film de Martin Scorsese, avec Leonardo DiCaprio : Schuttle Island, adapté du roman de Dennis Lahane. Scorsese dont Gangs Of New York était déjà un spectacle d'une violence cosmique présente son dernier opus comme étant "un film d'horreur gothique". On devine qu'il sera interdit aux enfants. L'histoire se passe dans un hôpital psychiatrique de haute sécurité pour des criminels extrêmement dangereux. On connaît le goût de Scorsese pour les images chocs. Mais la question se pose : jusqu'où peut-il encore aller ?
L'un des films les plus attendus, My Name is Khan, avec le célèbre acteur Shah Rukh Khan, est l'objet aujourd'hui à Mumbai de violentes attaques du Shiv Sena, parti ultra extrémiste hindou. C'est parce que Shah Rukh Khan, de famille musulmane, aurait un commentaire élogieux sur l'équipe pakistanaise de... cricket !

Cette année encore le Festival de Berlin n'échappe pas à son travers : la sélection oublie carrément le cinéma arabe et africain. Le Forum international du jeune cinéma a aussi changé de camp. Naguère fief du cinéma engagé, tricontinentale du 7è art, depuis quelques années (les temps changent !), le Forum est entré dans l'ordre commercial, des productions passe-partout.
C'est le cinéaste allemand Werner Herzog qui préside le jury international pour l'Ours d'Or. La sélection de 26 films est essentiellement européenne.
Inutile de guetter l'arrivée à Berlin de Roman Polanski. Le cinéaste polonais est toujours sous la garde de la police suisse dans son chalet montagneux. Son dernier film pourtant est au programme : The Ghost Writer, tiré du roman de Robert Harris. Il s'agit de la vie d'un "nègre" qui écrit la biographie de Tony Blair et qui soudain en fouillant dans son passé découvre d'étranges secrets bien gardés. L'ex-leader travailliste aurait une vie abominablement cachée... La série noire de Tony Blair va avoir des prolongations : ce type - présenté par certains comme menteur, magouilleur - est apparu l'autre jour devant la commission Chilcott, une désastreuse apparition.

Azzedine Mabrouki