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60ème Berlinale
L'Afrique à Berlin 2010
critique
rédigé par Jean-Marie Mollo Olinga
publié le 25/03/2010
Jean-Marie Mollo Olinga
Jean-Marie Mollo Olinga
Djo Munga
Djo Munga
After the Mine (Congo in Four Acts)
After the Mine (Congo in Four Acts)
Symphony Kinshasa (Congo in Four Acts)
Symphony Kinshasa (Congo in Four Acts)
Patrick Ken Kalala
Patrick Ken Kalala
The Man who sold the world
The Man who sold the world
Katembo Kiripi
Katembo Kiripi
Dieudo Hamadi
Dieudo Hamadi
Divita Wa Lusala
Divita Wa Lusala
The Man who sold the world
The Man who sold the world
Swel & Imad NOURY
Swel & Imad NOURY
Swel & Imad NOURY
Swel & Imad NOURY

Absents de la compétition officielle, les cinémas africains représentés cette année au Festival international du film de Berlin ont pointé du nez le 16 février 2010.

Tôt dans la martinée, à 9h30, dans la salle du Cinemaxx5, le réalisateur congolais (Rdc) Tunda Wa Munga Djo a présenté quatre films documentaires, des courts métrages issus d'un atelier de formation qu'il avait initié à Kinshasa. Quatre courts métrages dont il est co-producteur, avec le Sud-Africain Steven Markovitz. Ils ont été sélectionnés dans la catégorie Forum. Au total, 72 minutes qui montrent la République démocratique du Congo dans toute sa hideur. Ce qui a laissé le sentiment à un spectateur que "ce cinéma-là vient renforcer la perception négative que les Occidentaux ont de l'Afrique".

Ainsi, "Ladies in waiting" (24mn) de Dieudo Hamadi décrit la situation des femmes qui viennent d'accoucher et qui sont "emprisonnées" dans une maternité, faute d'argent pour pouvoir honorer leurs factures. Les négociations sont rudes et l'administration de la maternité ne veut rien entendre. Les plus "fortunées" d'entre elles n'obtiennent leur liberté que contre bijoux, téléphones portables ou boucles d'oreilles laissés en gage.
Kiripi Katembo, à travers "Symphony Kinshasa" (15,4mn), laisse traîner sa caméra sur les miasmes de la capitale congolaise: amoncellement impressionnant des ordures ménagères; inondations de cours d'eau dont les eaux noirâtres débordent de leur lit et côtoient les habitations; coupures d'électricité; infrastructures diverses tombées en désuétude; pauvreté des habitants présentés d'entrée de jeu comme des nuées d'oiseaux, etc.
C'est aussi ce jeune réalisateur qui a tourné "After the Mine" (13,38mn). Dans ce documentaire, l'on découvre le quotidien de certains habitants de Kipushi, une ville minière de la Rdc. Pour Kiripi Katembo, c'est ce genre de petites villes qui font la fortune de l'élite du pays. Mais, paradoxalement, montre le réalisateur, ceux qui y vivent ou qui y travaillent s'y débattent dans une extrême pauvreté. Malléables et corvéables à merci, ils font travailler même les tout-petits, pour tenter de joindre les deux bouts. Ceci, en s'intoxiquant quotidiennement par la poussière des cailloux qu'ils cassent, par l'eau et les sols contaminés.
Quant à "Shrinking Press" de Patrick Ken Kalala (19,19mn), il s'appesantit sur le bâillonnement de la presse. Si des journalistes sont assassinés - comme Frank Ngyke - lorsqu'ils sont considérés comme des opposants, le réalisateur n'en présente pas moins leurs compromissions avec certains hommes politiques qui les "arrosent", quand ils ne les manipulent pas tout simplement.

Filmées sans originalité, ces histoires, si elles montrent favorablement comment de jeunes cinéastes congolais se font la main dans le septième art, n'augurent nullement de l'ambition de ceux-ci d'aller au-delà du formatage des ateliers d'apprentissage, ou même des écoles.

Dans l'après-midi de ce 16 février 2010, à 17h45, les Marocains, sélectionnés dans la section Panorama, ont donné à voir, au Cinestar3, "The man who sold the world" (L'homme qui a vendu le monde) de Swel Noury et Imad Noury. Il raconte l'histoire de deux amis, X et Ney, qui habitent ensemble. Derrière leur comportement fraternel, il y a entre eux comme une tension sexuelle permanente. X tombe amoureux de Lilli, une artiste paumée, avec qui il rêve d'un bonheur... ambigu, tant l'influence qu'elle exerce sur lui l'empêche d'être heureux. Ce d'autant que Ney aussi est épris d'elle.
Inspiré d'une nouvelle de Dostoïevski, ce film déroutant, s'il en est, dégage un réalisme poétique qui épouse une forme impressionniste. Swel et Imad Noury choisissent, par exemple, le décor naturel de leur chambre pour y comprimer leurs personnages, afin de mieux dire et encadrer leur désarroi. Ce faisant, ils font porter l'attention du spectateur, non pas sur le fond du film, mais sur sa forme. Ici, la valeur de l'intrigue importe peu, dès lors que les deux co-réalisateurs insistent sur la description plastique du désarroi de X et de Ney. Et si leur film est si déroutant, c'est certainement parce qu'il laisse l'image s'exprimer, parce qu'il effectue des allers et retours constants entre le réel et le fantasme. En fin de compte, le film bascule dans le cinéma narratif, prenant régulièrement les allures d'un feuilleton dont les épisodes sont résumés par de longs titres : ce que le spectateur est appelé à rassembler.

Jean-Marie Mollo Olinga

(Article paru dans le quotidien Le Jour - www.lejourquotidien.net - du 18 février 2010)

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