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Femmes du Caire
Les Égyptiennes relèvent la tête
critique
rédigé par Michel Amarger
publié le 02/05/2010
Michel Amarger
Michel Amarger
Yousry Nasrallah
Yousry Nasrallah
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)
Femmes du Caire (Ehky ya Scheherazade)

LM Fiction de Yousry Nasrallah, Egypte, 2009
Sortie France : 5 mai 2010

Le clivage entre le cinéma commercial et celui des auteurs est parfois dépassé dans l'élan de la production égyptienne. Après certains films de Youssef Chahine qui ont bousculé les frontières, ceux de Yousry Nasrallah élargissent le champ. Conforté par l'impact de La Porte du Soleil, 2004, fresque sur les évolutions orientales, et l'accueil de L'Aquarium, 2008, sur fond désenchanté, Yousry Nasrallah met en scène une histoire de Waheed Hamed. Ce scénariste réputé notamment pour L'immeuble Yacoubian de Marwan Hamed, 2006, a voulu confier un récit à Nasrallah. "Les films basés sur des scripts de Waheed Hamed sont généralement très réussis, directs, des films grand public. Mes films ont eu la réputation d'être moins accessibles, des films d'auteur", estime le cinéaste, révélé par Vols d'été, 1987, et Mercedes, 1993.
Attaché à l'expression formelle, il s'épanouit avec Femmes du Caire, en indiquant : "Une des caractéristiques les plus attrayantes du scénario de Waheed Hamed est l'inversion des rôles, les hommes ici sont les objets du désir." Indigné par la pression sociale exercée sur les Égyptiennes qui assurent pourtant souvent les revenus des ménages, Nasrallah les éclaire amoureusement : "Formellement, ce paradoxe m'a permis de restaurer et de subvertir un lien avec une belle tradition du cinéma égyptien : des mélodrames superbes et des femmes magnifiques."

Femmes du Caire est donc un mélo composé de quatre histoires. La relation de Hebba qui anime un talk show à la télé, avec Karim qui brigue le poste de rédacteur en chef à son journal, est le pivot du film. Pour assurer sa promotion, Karim demande à Hebba de calmer ses attaques contre le gouvernement. Elle décide alors de traiter des faits divers féminins en invitant des spectatrices à témoigner. L'une d'elles raconte comment les exigences d'un prétendant l'ont conduite à la révolte. Une autre retrace la manière dont un amant lui a fait perdre la raison en la compromettant. Une ancienne détenue dévoile comment elle a tué un jeune commis qui a abusé d'elle et de ses deux sœurs en leur promettant d'être leur fiancé exclusif. Ces témoignages attestent des désillusions de l'amour perverti par la société, et constituent des épisodes à l'intérieur du film.
"J'ai aimé qu'il ne s'agisse pas d'un seul récit mais de quatre histoires croisées, et que cela parle de sexualité - chose rare dans le cinéma égyptien", souligne Nasrallah en revenant chaque fois au rapport conflictuel entre la journaliste curieuse et son compagnon qui tente de la brider. Secouée par les révélations des invitées au talk show, qui s'inscrivent en fond d'écran derrière elle, Hebba est progressivement gagnée par leur détermination. " Ce n'est plus un écran mais un miroir où Hebba regarde le visage de l'autre comme son propre visage, et par là l'histoire de l'autre comme sa propre histoire", commente le réalisateur.

"Mes personnages ont généralement été rebelles dans le passé et doivent renouer avec la société", explique l'auteur de La Ville, 1999. "Dans Femmes du Caire, c'est l'inverse. Tous sont d'abord conformistes, puis rompent avec la morale dominante." Cette évolution conduit le couple central à une violence explosive tandis que les femmes du talk show affichent leur marginalisation. Yousry Nasrallah passe d'un univers à l'autre avec une aisance qui fleure le ton des Milles et une nuits. "Femmes du Caire renoue frontalement avec ce mode de transmission du savoir et de l'expérience", reconnaît il. "Et rien que ça, c'est déjà prendre position par rapport à la pensée dominante en Egypte, où les islamistes sont d'accord avec les laïcistes pour refouler la part de la culture nationale qui nous vient des anciens mythes."

Si la tension du Caire est palpable, Yousry Nasrallah signe un film anti-naturaliste. Il explore les décors de manière expressionniste, faisant de l'appartement des journalistes un endroit fermé qui les étouffe, ou multipliant les angles de vue sur le plateau de télé. Le cinéaste joue des artifices de la mise en scène, valorisant ses acteurs notamment Mona Zaki, popularisée par des rôles de midinette, transfigurée dans les tenues séduisantes de Hebba. En bousculant les tabous, Femmes du Caire s'inscrit dans la veine des films sociaux, magnifiés par leur traitement. "Le mélodrame permet de raconter des relations paradoxales, mais réelles, entre hommes et femmes", résume Nasrallah. "D'une part, il s'adresse à tout le monde. D'autre part, ce genre a un grand potentiel subversif."

Vu par Michel AMARGER
(Afrimages / RFI / Médias France / Africiné)

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