AFRICINE .org
Le leader mondial (cinémas africains & diaspora)
Actuellement recensés
24 937 films, 2 562 textes
Ajoutez vos infos
Artemisa FERREIRA, jeune réalisatrice cap-verdienne
"Au Cap-Vert, les entreprises ne font toujours pas confiance aux projets cinématographiques"
entretien
rédigé par Bassirou Niang
publié le 14/12/2022
Artemisa FERREIRA, Réalisatrice, scénariste et productrice cap-verdienne
Artemisa FERREIRA, Réalisatrice, scénariste et productrice cap-verdienne
Bassirou NIANG, Journaliste à Africiné Magazine
Bassirou NIANG, Journaliste à Africiné Magazine
"Identidade Repartida" (2013)
"Identidade Repartida" (2013)
Livre de poésie érotique publié par Artemisa Ferreira, en 2017 (ISBN: 978-989-99870-1-2 | 48 pages)
Livre de poésie érotique publié par Artemisa Ferreira, en 2017 (ISBN: 978-989-99870-1-2 | 48 pages)
Livre de poésie publié par Artemisa Ferreira, en 2009
Livre de poésie publié par Artemisa Ferreira, en 2009
Artemisa Ferreira, réalisatrice
Artemisa Ferreira, réalisatrice

Titulaire d'un Master en Réalisation cinématographique et télévision, Artemisa Ferreira est une jeune réalisatrice qui vit et travaille à Praia, au Cap-Vert. L'objectif, quand elle franchissait le portail de l'institution universitaire n'était pas de tomber dans l'univers du cinéma, mais le destin l'y a poussée. Pour elle, avec le recul, ce fut la meilleure décision qu'elle ait pu prendre dans sa vie. "J'adorais regarder des films, les commenter et réfléchir à la façon dont les scènes sont faites. Le premier jour de cours à l'université, j'ai réalisé que j'étais là où je devais être", confie-t-elle joyeusement.

Avez-vous déjà réalisé des films (courts ou longs-métrages) ? Si oui, comment ils s'intitulent et quelles histoires ils racontent ?

Dans mon projet de fin d'études, j'ai présenté un court documentaire nommé Identidade Repartida (L'Identité repartie) [en 2013, NDLR]. C'était plus un reportage qui parle de l'identité des descendants des Cap-Verdiens qui sont nés au Portugal. Il cherche à comprendre leur identité et à connaitre leur véritable nationalité. La majorité des descendants de Cap-Verdiens souffrent d'un problème d'identité. Cela m'a amenée à réfléchir et à réaliser un projet de fin d'études de Master sur le sujet.


Identidade Repartida from artemisa ferreira on Vimeo.



J'ai un court, Oji ("Aujourd'hui") [réalisé en 2015 et multiprimé, NDLR]. Ce film, je l'ai présenté durant le festival Oia 2022, c'est un court métrage fiction d'une minute. Il s'inspire des fausses relations amoureuses sur Facebook. Nous nous disons "Je t'aime !" sur facebook, mais une fois en face, on s'ignore mutuellement. Dans les relations familiales, il y a de la distance, et bizarrement, c'est comme sur le réseau social que nous n'arrivons pas à créer un véritable rapprochement humain.


Oji - Today, Artemisa Ferreira from artemisa ferreira on Vimeo.



Je viens de finir mon premier documentaire long-métrage [Os 47's - Depoimentos que ficaram, NDLR] qui parle de problèmes de la sécheresse et de la famine au Cap-Vert en 1940. À partir des témoignages, je parle de toutes les épreuves traversées par la population. Le Cap-Vert a perdu environ 40 % de sa population à cause de la famine dans les années 1940. La première du film s'est déroulée le 14 octobre 2022 [à Praia, NDLR].

Avez-vous en ce moment des projets de films ?

Je travaille sur mon prochain documentaire qui s'intéresse au chanteur et diplomate Renato Cardoso. Il a contribué au rayonnement de la musique cap-verdienne, mais il est mort dans des circonstances jamais élucidées. Actuellement, je suis en phase de recherche de financements.
En parallèle, j'écris un scénario pour une fiction à forte teneur psychologique puisqu'il parle de la dualité avec l'intime. En plus de la réalisation, l'écriture de scénarios est une autre passion.

Travaillez-vous en partenariat avec d'autres réalisateurs ou réalisatrices de pays étrangers ?

Je n'ai pas encore travaillé avec d'autres réalisateurs ou réalisatrices de pays étrangers, mais dans le futur proche, je voudrais bien le faire.

Avez-vous des difficultés à exercer votre métier de réalisatrice ?

Non ! J'aime être réalisatrice, et quand tu aimes quelque chose, les difficultés ne sont que des détails pour vous. Dans la réalisation on peut se dédoubler, mais aussi créer un nouveau monde, dénoncer ce qui ne va pas, éduquer, aider au réveil des consciences, et ça me plaît beaucoup. La difficulté que je peux avoir, c'est de ne pas recevoir un financement à temps pour finir mon travail. Au Cap-Vert, pour le moment, nous ne pouvons pas vivre du cinéma. Il faut trouver des activités annexes pour gagner sa vie.

Justement, comment faites-vous donc pour avoir des financements ?

Pour en avoir, j'ai envoyé des demandes un peu partout, y compris chez les sponsors. Tous les films que j'ai réalisés jusqu'à maintenant, je les ai faits avec mes émoluments. J'ai même accumulé des dettes que je dois payer.

Maintenant, le Ministère de la Culture et de l'industrie créative a créé le NuNac (Centre national du cinéma du Cap-Vert) qui pourra apporter un appui aux projets à travers des fonds. Pour la production de mon documentaire Os 47's - Depoimentos que ficaram ("Années 40, les témoignages qui sont restés"), des ami(e)s m'ont aidée du mieux qu'ils ont pu. Comme je n'avais pas de financement, j'ai fait tout le travail de production (son, image, post-production) ; ce qui peut être source de lacunes techniques, surtout dans la qualité du son.

Comment voyez-vous le cinéma au Cap-Vert ?

Au Cap-Vert, nous en sommes au début de notre cinéma et nous ne sommes pas dans les conditions techniques nous permettant de faire exactement ce que nous avons envie de faire.
Le plus gros problème du cinéma au Cap-Vert est de trouver des financements. Les entreprises ne font toujours pas confiance aux projets cinématographiques. Elles ne voient toujours pas la valeur du cinéma ni les gains qui peuvent en découler. En revanche, nous avons le cadre physique, naturel pour des tournages. Beaucoup de jeunes diplômés de l'université commencent à faire leurs premiers pas au cinéma. Mais, il faut bien que les conditions d'épanouissement professionnel soient là.

La consolation est que nous avons dans notre pays quelques festivals internationaux de cinéma, qui aident à divulguer la production locale. Il y a aussi que beaucoup de nos collègues ont déjà commencé à travailler dans des co-productions internationales. Et tout cela montre la valeur du travail abattu sur place. Je pense que les conditions de production et de financement seront réunies d'ici peu et cela aura un impact positif sur la qualité des films.

Entretien réalisé par
Bassirou NIANG

Films liés
Artistes liés
Structures liées
événements liés