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Les femmes-étoiles de Dyana Gaye
Deuxième partie du tournage, au Sénégal
critique
rédigé par Baba Diop
publié le 03/06/2013
Dyana Gaye, réalisatrice
Dyana Gaye, réalisatrice
Baba Diop (Africiné)
Baba Diop (Africiné)

La réalisatrice sénégalaise Dyana Gaye a bouclé samedi 9 mars 2013, la deuxième partie du tournage de son véritable premier long métrage : "Des étoiles". La troisième partie du tournage démarre [après, fin mars 2013], à New York. Cinekap est coproducteur du film.

Après Turin (Italie), Dyana Gaye est arrivée à Dakar (Sénégal) au début du mois de mars pour mettre en boite une partie de son dernier film, " Des étoiles", qu'elle vient de boucler après 10 jours de tournage, avant l'étape américaine (New York) dans laquelle apparaitra parmi les personnages retenus, Sidney Poitier (joué par Major West), un clin d'oeil hommage au premier acteur africain américain à avoir reçu le 13 avril 1964 l'Oscar du meilleur acteur pour le film de Ralf Nelson, "Lilies of the Field" (Le lys dans les champs). Certes, avant lui, il y avait l'actrice Hattie Mc Daniel, oscar du meilleur second rôle en 1939, pour sa prestation de nourrice dans "Autant en emporte le vent". Avec le film de Dyana Gaye, West Major (Sidney Poitier) sera le gérant du Bazar de Mame Amy dans le quartier new-yorkais Little Senegal.

"Des Etoiles" est un chassé croisé d'histoires de vie qui se déroulent en trois endroits : Turin, Dakar et New York. Déjà avec "Transport en commun" (2009), comédie musicale, Dyana Gaye s'amusait à croiser les destins des passagers de ce taxi brousse en partance pour Saint Louis. L'espace y était clos. Par contre avec "Des Etoiles", l'espace est éclaté avec pour fil d'Ariane la famille qui relie les protagonistes.
Mame Amy, la Tante d'Amérique qui, après 15 années d'absence, débarque à Dakar pour les obsèques de son mari, El Hadj Samba Fall dit l'Américain, alors que dans le même aéroport Sophie embarque pour Turin, rejoindre son mari Abdoulaye qui, sans attendre, prend le chemin de New York, attiré par le mirage américain. L'esprit du film est résumé par Ada dont l'association se bat pour l'intégration des femmes expatriées dans la société italienne.

En parlant de solitude, elle dit : "..Regardez le ciel. Si vous regardez une étoile, elle a l'air seule. Mais une étoile n'existe que parce qu'il y en a une infinité d'autres. Ce qui a du sens, c'est le dessin que ces étoiles forment, reliées, les unes aux autres. C'est ça un ciel." Dés lors, le film prend les tournures d'un ciel étoilé de solitudes. Les trois protagonistes que sont Mame Amy, Sophie et Abdoulaye se retrouvent en terrain inconnu et chacun des personnages doit librement prendre en charge son destin, pour sa survie dans leur milieu hostile d'apparence. Abdoulaye apparait sous les traits d'un fugitif.

Le film est une ode à l'émancipation de la femme. Les personnages féminins de ce film entrain de se faire, sont entreprenants, indépendants d'esprit et de corps. Et, c'est une fois encore Ada qui résume cette nouvelle liberté. Elle s'adresse à Sophie en ces termes "Mais ici tu sais, une femme peut vivre sans mari, avec des amoureux de temps en temps, si elle a envie. C'est pas un problème."

Le film est aussi une ode à la fraternité. Ada est presque une seconde mère pour Sophie ; Sydney Poitier Sy (Major West), un oncle pour Abdoulaye ; Thierno le frère d'Amérique s'attache à ses demi frères. Un film dans lequel la musicalité des trois langues : le wolof, l'italien, l'américain, s'imbrique dans l'esthétique sonore désirée par la réalisatrice, en plus des trois univers qui traversent le film. Un film triptyque qui joue sur trois ambiances : Méditerranée, Amérique du nord et sud Sahara avec une tonalité toute africaine portée par la musique (Mbalax, afro beat de Fela Kuti, et jazz).

Dyana Gaye fait du glissement des espaces où se déroulent les histoires la marque de son cinéma. Avec "Une femme pour Souleymane" (2000), elle faisait un constant aller-retour entre Paris et Dakar pour parler de la solitude de Souleymane, jeune sénégalais arrivé à Paris trois ans plus tôt et qui, pour tromper sa solitude, s'invente une autre vie. "J'ai deux amours" (2007), c'est la solitude d'un vieil homme à qui ses souvenirs tiennent compagnie.

Enfin avec "Deweneti", le jeune Ousmane, grâce à ses prières, veut changer le destin de ceux qu'il croise sur son chemin.

L'existence humaine et son cours deviennent les mamelles nourricières de la création de Dyana Gaye.

Baba Diop

Article publié le 15/03/2013 sur Sud Quotidien (Dakar).

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