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La Force noire, E. Deroo et A. Champeaux
L'épopée des "Tirailleurs Sénégalais"
critique
rédigé par Mass Ly
publié le 10/07/2008
La force noire : Gloire et infortunes d'une légende coloniale, de E. Deroo, A. Champeaux. Ed. Tallandier, 2006.
La force noire : Gloire et infortunes d'une légende coloniale, de E. Deroo, A. Champeaux. Ed. Tallandier, 2006.
Indochine française 1856-1956. Guerres, mythes et passions, de Eric Deroo et Pierre Vallaud. Ed. Perrin, 2003
Indochine française 1856-1956. Guerres, mythes et passions, de Eric Deroo et Pierre Vallaud. Ed. Perrin, 2003
L'illusion coloniale, de Eric Deroo, Sandrine Lemaire. Ed. Tallandier, 2006.
L'illusion coloniale, de Eric Deroo, Sandrine Lemaire. Ed. Tallandier, 2006.
Sud-Ouest, porte des outre-mers : Histoire coloniale & immigration des suds, du Midi à l'Aquitaine, Collectif. Ed. Milan, 2006.
Sud-Ouest, porte des outre-mers : Histoire coloniale & immigration des suds, du Midi à l'Aquitaine, Collectif. Ed. Milan, 2006.
Zoos humains. Au temps des exhibitions humaines, Dir : Bancel, Blanchard, Boëtsch, Deroo, Lemaire. La Découverte, 2004.
Zoos humains. Au temps des exhibitions humaines, Dir : Bancel, Blanchard, Boëtsch, Deroo, Lemaire. La Découverte, 2004.
Paris couleurs, un film de Pascal Blanchard et Éric Deroo, Voix off: André Dussollier. 2005, 54 min.
Paris couleurs, un film de Pascal Blanchard et Éric Deroo, Voix off: André Dussollier. 2005, 54 min.
Camp de Thiaroye, de Ousmane Sembène et Thierno Faty Sow, 1988
Camp de Thiaroye, de Ousmane Sembène et Thierno Faty Sow, 1988

La Force Noire est le récit du rôle des "tirailleurs sénégalais" dans les troupes françaises. Pour y arriver, l'historien Eric Deroo et Antoine Champeaux s'appuient sur des images méconnues du grand public : celles de la vie des "tirailleurs" dans les tranchées, de leurs instants de gloire et de difficultés.

La Force noire débute et se clôt sur un "Grand place". À ce lieu de rencontre et d'échange, plusieurs anciens combattants se remémorent encore de l'époque, où ils s'engagèrent dans les tranchées au sein des troupes de "Tirailleurs sénégalais". Djissé Diarra fait partie de ces figures -originaires du Mali, du Sénégal, de Côte d'Ivoire etc, qui ont libéré la France de la domination allemande. Ils témoignent de leurs périples à Tripoli, à Naples entre autres.

La "force" de La Force noire réside dans la rigueur avec laquelle, ces réalisateurs s'évertuent, à rendre compte avec exactitude, de la saga des soldats noirs aux côtés de leurs frères d'armes français. À travers ce film, E. Deroo et A. Champeaux essayent de mettre en scène les conflits tels que vécus par les "Tirailleurs sénégalais". La plupart des séquences sont en noir et blanc, agrémentées de commentaires sonores de l'époque. Le documentaire adopte une démarche didactique : l'historien, E. Deroo et son co-réalisateur, remontent depuis les prémices des premiers régiments d'infanterie, composés de troupes africaines. On était au XVIème siècle, lorsque les navigateurs européens entamèrent leurs vastes explorations du Nouveau Continent. Ils employèrent alors des auxiliaires sur place, parmi lesquels des militaires africains.

Au-delà de ce rappel historique, les réalisateurs innovent en montrant les soldats africains en pleine activité pendant, la Première, puis, la Seconde Guerre mondiale.
Sur certaines séquences, l'on voit des tirailleurs en pleine parade, défilant aux côtés de leurs "frères d'armes". Sur d'autres séquences, ils apprennent à lire, à l'ombre d'un arbre en pleine campagne pendant que d'autres fument avec leurs homologues français. Au sein des cantonnements, un groupe de soldats prient. De ces moments d'honneurs, Deroo et Champeaux passent, aux difficultés de la vie dans les tranchées. Là, sont mises en exergue, des images de certains "Tirailleurs sénégalais" supportant mal l'hiver 1944. Les soldats africains souffrent. Durement frappés par les offensives allemandes, ils accusent des pertes considérables. En plus des faits et des dates qui ont marqué cette étape de l'Histoire des "Tirailleurs", les réalisateurs nous replongent dans les émotions et impressions de l'époque.

La Force noire met à plat les clichés et préjugés qui, dès le début du XX ème siècle, entâchent l'image des "Tirailleurs". La faiblesse des soldats africains durant l'hiver 1944 démonte le mythe de "ces personnages souriants mais redoutables au combat". Un mythe amplement "instrumentalisé" par les troupes allemandes sous la houlette d'Adolf Hitler. Le documentaire rappelle aux téléspectateurs que bons nombres de Tirailleurs sénégalais furent emprisonnés dans des camps de concentration.

En Afrique, une forme de propagande se développe. Blaise Diagne, premier député noir à l'Assemblée Nationale française, est chargé de recruter davantage de soldats dans les colonies. "En versant le même sang, vous gagnerez les mêmes droits". Tel est le slogan qui, dans les années 1920, convainc alors quelques 50 000 soldats d'Afrique occidentale française et des milliers de malgaches. En parallèle, La Force noire évoque de manière très vague les injustices qui découleront de ces promesses : d'abord, le massacre de "Thiaroye 1944", période pendant laquelle, près de 1280 anciens prisonniers de guerre acceptent de retourner au Sénégal, en échange de leurs droits. Sur place, les "Tirailleurs" découvrent avec amertume qu'ils ne pourront pas obtenir ces droits. Il en résulte une révolte durement réprimée par l'armée française. Bilan : trente trois morts. Le documentaire montre aussi, sans trop s'épancher, la reconnaissance tardive de la France vis-à-vis de ces soldats. Des extraits de l'ancien président français, Jacques Chirac qui décore, en 2004, d'anciens tirailleurs de la Légion d'Honneur. Puis, annonce la décristallisation, en 2007 par la France, des pensions des grands invalides de guerre. Une mesure qui permet d'aligner les pensions des anciens "Tirailleurs Sénégalais" sur celles de leurs homologues de la métropole.

Seulement, La Force noire, à aucun moment, n'a précisé que cette décision de Chirac ne faisait aligner que les seules retraites et pensions liées à des actions de combat. Et, que pour les "Tirailleurs sénégalais" et leurs homologues français, le combat pour la décristallisation doit se poursuivre notamment pour les pensions militaires de retraite, "pour ceux qui ont acquis ce droit". D'ailleurs, la dernière motion votée, à ce propos, par le conseil national pour les droits de l'ancien combattant d'outre mer et de l'armée française se résume en ces termes : "nous réclamons la poursuite de décristallisation totale en ne la limitant pas au prestation du feu mais, en l'étendant à la parité en matière de pension militaire de retraite et de pension de réversion aux veuves…"

Mass LY

Documentaire 30 minutes. 2007.

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