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Clôture du Festival de Taormina 2009
Sicile d'Orient
critique
rédigé par Azzedine Mabrouki
publié le 19/06/2009
Nour-Eddine Lakhmari
Nour-Eddine Lakhmari
Casanegra, 2007
Casanegra, 2007
La Longue nuit (Al Lail Al tawil)
La Longue nuit (Al Lail Al tawil)
Magdi Ahmad Ali
Magdi Ahmad Ali
Youssef CHAHINE (يوسف جبريل شاهين), Egypte
Youssef CHAHINE (يوسف جبريل شاهين), Egypte
Khaltet Fawzia
Khaltet Fawzia
Casanegra
Casanegra
Casanegra, Storyboard de Naoufal Lhafi
Casanegra, Storyboard de Naoufal Lhafi

Le cinéma arabe triomphe au 55° Festival International du Film de Taormina. Trois cinéastes de Syrie, du Maroc et d'Égypte ont raflé les meilleurs prix.

Bellissima Sicilia où la nuit venue, à la seule lueur de la lune, on regarde sur le grand écran du Teatro Greco de Taormina, cité élégantissime et raffinée, les programmes du festival qui a passé la barre des soixante films. Et où sur les façades des vieux palais somptueusement restaurés on admire une foule de détails qui rappellent l'âge d'or de l'architecture musulmane, les splendeurs d'Orient.
Coup de chapeau au jury du festival, lequel a battu d'abord le pavillon méditerranéen, qui a distingué le travail de trois cinéastes arabes : le Syrien Hatem Ali, le Marocain Nourredine Lakhmari et l'Égyptien Magdy Ahmed Ali, respectivement Grand Prix (Taureau d'or) pour Al Lail Al tawil (La longue nuit), meilleur metteur en scène pour Casanegra et mention spéciale pour Khaltet Fawzia.

Le très beau et très courageux Al Lail al Tawil dresse le portrait des dissidents syriens, intellectuels et artistes, journalistes et hommes politiques inféodés au pouvoir de Hafez El Assad et de ce fait tous condamnés à de longues années de prison. Hatem Ali mène son récit avec esprit, intelligence et émotion. Il est désormais l'auteur d'une oeuvre exceptionnellement réussie. Son film a les rares qualités de ceux de Youcef Chahine et de Mohamed Mallas. Cette beauté dans le cinéma arabe, on croyait qu'elle était irrévocablement perdue mais elle s'exprime clairement et librement dans cette oeuvre syrienne. Il faut saluer la pléiade d'actrices et d'acteurs syriens qui imprime à ce film sa grande profondeur où passent à la fois la douleur, la souffrance, le regret et la joie.

L'histoire se passe à Damas la nuit où l'on apprend que grâce à des pressions internationales (au passage, le cinéaste rend hommage à l'ex-président français Jacques Chirac qui a fait libérer et accueilli en France des opposants syriens) des prisonniers politiques sont sur le point de sortir du bagne.
Durant cette longue nuit d'hiver, métaphore de l'époque très sombre qu'a connue la Syrie, soudain l'espoir est permis. On assiste à l'attente anxieuse des familles de voir un être cher libre enfin. Et en même temps, durant cette nuit, tous les non-dits ressortent. On se dit tout en face, ce qu'on a caché et pas osé dire durant des années. Au sein des mêmes familles, les rapports se disloquent. On se déchire et on finit par se réconcilier après avoir vidé toute l'angoisse gardée au fond du coeur. On entend même les traîtres finir par avouer leur traîtrise et dire qu'ils en souffrent. Une vraie tragédie de William Shakespeare dans le nuit syrienne.
On ne dira plus que les malheurs des pays arabes viennent toujours de l'extérieur, puisque Al Lail Al Tawil montre bien que les pires ennemis de la Syrie sont les Syriens eux-mêmes.

Le succès de Casanegra de Nourredine Lakhmari est aussi hautement mérité. Le regard caustique, carrément furieux et enragé par le déclin de sa ville, a beaucoup impressionné le public italien qui regarde parfois les portraits cinglants que leurs cinéastes font de Naples engloutie sous les ordures.

De même, le film égyptien s'est inscrit au palmarès grâce à la fougue avec laquelle l'actrice Ilhem Shahin (Fawzia dans le film) transforme un coin inquiétant situé sous les viaducs du Caire en villégiature très acceptable où défilent ses cinq maris restés ses amis malgré les divorces.

Succès aussi dans la section "au delà de la Méditerranée" du film américain Corso the last beat, de Gustave Reinniger. Un portrait hilarant du poète Gregory Corso, ami de Kérouac, Ginsberg et Burroughs. Un artiste surdoué, un poète vagabond dont les modèles étaient Oscar Wilde et Arthur Rimbaud.

Azzedine Mabrouki

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