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Festival de Cannes
Hors la loi, sous haute tension
critique
rédigé par Azzedine Mabrouki
publié le 23/05/2010
Affiche du 63e Festival de Cannes, réalisée par Annick Durban d'après une photographie de Juliette Binoche par Brigitte Lacombe
Affiche du 63e Festival de Cannes, réalisée par Annick Durban d'après une photographie de Juliette Binoche par Brigitte Lacombe
Le réalisateur de Hors-la-loi, Rachid Bouchareb
Le réalisateur de Hors-la-loi, Rachid Bouchareb
Hors-la-loi
Hors-la-loi
Jamel Debbouze dans Hors-la-loi
Jamel Debbouze dans Hors-la-loi
Hors-la-loi
Hors-la-loi
Hors-la-loi
Hors-la-loi

Rachid Bouchareb, le souffre-douleur de l'extrême-droite en France, a présenté Hors la loi vendredi au 63° Festival de Cannes. Il mérite largement de remporter un grand prix, sinon la palme.

La Croisette en partie envahie par un ramassis de pieds noirs et d'anciens tortionnaires était vendredi sous haute tension, avec CRS et gendarmes en tenue de combat à tous les carrefours.
À la projection de presse du matin, Hors la loi a été très longuement applaudi et la salle de conférences de presse vite remplie de journalistes et de cameramen de télévision.
Très émouvante, superbe, Chafia Boudraa a créé une énorme sympathie parmi les envoyés spéciaux du monde entier en parlant de son rôle de mère dans le film: " Je suis la mère du monde entier, votre mère aussi...", a t-elle déclaré sous des applaudissements nourris.

Hors la loi est un film riche en rebondissements, avec des situations très fortes menées jusqu'au bout. C'est une oeuvre de colère, de révolte et de larmes C'est aussi une histoire d'amour de trois fils pour leur mère. La monstrueuse répression de Sétif de Mai 45 s'est passée le jour de la libération de Paris. Le film commence par des photos d'archives de Paris en liesse. Il se termine par les images d'Alger en Juillet 62 et la fête d'Indépendance.

Après la mort du père à Sétif, la mère, modèle de bonté et d'endurance, a quitté le pays pour un bidonville de Nanterre. Les trois frères ont grandi. Messaoud (Roschdy Zem) s'est engagé en Indochine. Abdelkader (Sami Bouajila) est devenu le chef d'une cellule FLN. Said (Jamel Debbouze) a préféré les sordides bas fonds de Pigalle et le monde compromettant de la boxe. Tous les trois sont restés profondément liés à leur mère.
Le début du film fait songer à Chronique des Années de Braise de Mohamed Lakhdar Hamina. La famille de paysans est expropriée de sa terre par un ordre outrancier du régime colonial. C'est un moment extrêmement émouvant du film où l'image enregistre la détresse de toute l'Algérie dépossédée. On admire là la performance d'acteurs par Ahmed Ben Aissa, le père et déjà celle de la mère Chafia Boudraa.

Le tableau de l'occupation coloniale d'une extrême noirceur, la violence de la répression a poussé tant d'Algériens dans l'émigration. Se posait alors la question de l'organisation de la lutte sur le territoire même de la France. Des cellules de résistance sont mises en place avec l'aide discrète mais fort courageuse d'hommes et de femmes français au mépris de leur vie.
Bouchareb illustre dans son film de façon dramatique la lutte FLN-MNA, avec des réglements de compte terrifiants qui balayent la croyance naïve que le combat nationaliste était menée dans l'union sacrée.

Avec Hors la loi, Rachid Bouchareb a fait une grande impression encore une fois à Cannes. Depuis des jours, toute la presse mondiale attendait la projection. Le cinéaste a affronté sereinement tous ceux qui se sont posés comme détracteurs de son travail (sans l'avoir vu).
"Hors la loi est un film, ce n'est pas un champ de bataille", répétait-il lors de sa conférence de presse. C'est une oeuvre qui vise à l'apaisement des relations franco-algériennes et non le contraire. L'abcès du passé colonial est maintenant percé, tout le monde va pouvoir s'exprimer. Le public comme les historiens.
"De quoi faut-il avoir peur ? demande le cinéaste. Les Algériens, les Français, les Maghrébins, les Africains, surtout les nouvelles générations, ont besoin de connaître le passé colonial. C'est aussi le rôle du cinéma".

Azzedine Mabrouki

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