Coktail et ficelles d'un festival de cinéma africain et créole qui sait se rendre nécessaire.

" Dès les débuts de Vues d'Afrique en 1985, nous avons cherché à mélanger les disciplines. C'est une conception de documentariste. Le cinéma permet d'ouvrir l'appétit sur un sujet mais peut rarement offrir une palette globale de réponses, ça n'apprend rien en soi. Donc une fois l'intérêt éveillé, c'est le moment de s'informer. Et nous aimions bien l'idée d'un événement associé au festival de cinéma. Aller à Vues d'Afrique, ce n'est pas juste aller au cinéma voir des films africains. C'est une rencontre avec des cinéastes, c'est une découverte culinaire, visuelle, sonore. Nous voulions que les spectateurs se disent : " Il se passe quelque chose à ce festival là et nous voulons y être. "
Même si à Montréal il existe beaucoup de festivals, aucun ne nuit aux autres. C'est structurel. Quand il pleut, plein de champignons différents apparaissent. Ainsi la kyrielle de festivals répond-elle à l'omniprésence américaine, à la surenchère des films américains des majors qui monopolisent les écrans tout au long de l'année.
Cependant, on subit la loi du plus gros avec la précarité de la situation économique. Et pour les institutions, le cocktail cinéma, culture et Afrique est d'une part marginal, mais d'autre part, invite à la bonne action annuelle. Il faut utiliser à fond cet argument aussi minime soit-il. Mais ici, au Québec, au Canada, nous ne recevons pas grand chose. Les institutions ne comprennent pas le rôle que peut jouer un festival comme Vues d'Afrique, en particulier au sein de la Francophonie.
Cependant, il est difficile de parler de festival qui servirait l'intégration car en fait, les communautés ne vont pas voir les films qui les concernent. Pourtant, l'événement demeure l'un des rares où les différentes communautés ont une raison de se côtoyer entre elles. La communauté québécoise de souche vient chaque année plus nombreuse. Donc, si le cinéma demeure le noyau dur, les activités connexes permettent de créer un véritable rassemblement culturel unique en son genre en Amérique du Nord. "

propos recueillis par Pascale Pontoreau

Gérard Le Chêne. Président fondateur de Vues d'Afrique, festival lauréat du Prix du rapprochement interculturel du Québec en 1995. Réalisateur et producteur de films documentaires, on lui doit entre autres : Anatomie de Tarzan (1997), Les Racines de l'espoir (1997), Soleil dans la nuit (1995), Tristan et Juliette ou l'amour en l'an 2000 (1994).