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Sénégalaises et islam
d'Angèle Diabang-Brener
critique
rédigé par Olivier Barlet
publié le 20/03/2007

Révélée en 2005 par un court documentaire très réussi, Mon beau sourire, sur le tatouage des gencives, Angèle Diabang-Brener poursuit sa démarche en se mettant à l'écoute de femmes sénégalaises dans leur rapport à l'islam. Monteuse de formation, c'est clairement là qu'elle donne à ses films l'énergie qu'ils transmettent. Un rythme s'installe au diapason du sujet, qui respecte l'expression tout en dynamisant la perception. Évoluant entre cinq femmes musulmanes fort différentes dans leur vécu de la religion, du détachement respectueux au voile systématique, Sénégalaises et islam ne transmet pas seulement une panoplie de discours et une mosaïque de positionnements. En dehors de positions radicales de certaines sur la charia, il ressort d'une manière générale une tolérance puisée dans la compréhension de la religion elle-même, échappant aux dogmatismes largement médiatisés. En somme, le lieu commun habituel lorsqu'on parle de l'islam au Sénégal. Mais un contrepoint s'impose doucement, celui d'une société où la religion occupe peu à peu l'espace public, où la radicalisation progresse à la faveur d'un renforcement du contrôle social, où les signes extérieurs comptent davantage au point d'être perçus comme des obligations. C'est bien sûr dans cette paradoxale valorisation par des femmes épanouies d'une hégémonie sur leur vie et d'une restriction de leur liberté d'expression et de circulation que ce film inquiète. Angèle ne tire pas le signal d'alarme, elle se contente de placer sa caméra à la juste distance pour donner autant que possible la parole et d'en faire par le montage un constat en forme de point d'interrogation. Ce faisant, et sans crier gare, elle éclaire la tristesse de la vision exprimée par une des cinq femmes rencontrées d'une vie "où on se suffit de ce qu'on a". Elle l'éclaire d'autant plus que cette vision d'une femme qui a choisi sans pression le voile précède celle d'une autre qui dit simplement : "je me sens par ma religion comme une créature divine". Un beau programme d'affirmation de soi.

Olivier Barlet

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